ROME / Philippe LEUCKX

 

1

 

(vicolo del Cedro)

 

 

Les murs tournent

comme la mélancolie

l’été sera passé

et notre bonheur presque

quelqu’un est venu

nous chuchoter

un peu de lumière

à l’épaule

la ruelle poursuit

en nous sa trace

 

2

 

(rione uno)

 

La fontaine de Monti

recueille les miettes

les conversations

la confidence d’un ami

elle résonne loin

entre le matin

les lueurs sur les murs

la main qu’on presse

de peur de la perdre

 

3

 

(Borghese)

 

Tout le parc vibre

de mille feuilles cachées

de coeurs et d’arbres

la poussière

un dû à la saison

un espace pour les mots

 

 

Philippe Leuckx

Inédits, écrits ce 31.05.09 pour le blog

 

Ses dernières parutions:

« Rome rumeurs nomades » (Le Coudrier, 2008),

"Etymologie du coeur" (Encres vives, 2008),
"Périphéries" (Encres vives, 2008),
"Terre commune" (L'arbre à paroles, en coll., 2009)

 

 

Masseur de langue

Un peu comme la plante de pied, la feuille de vigne ou le crâne de Bruce Willis, la langue possède une infinité de points sensibles en liaison avec le reste du corps. Le massage de langue se pratique avec les pouces et les index, exceptionnellement avec le majeur de la main droite. Palpation, malaxation, tirage, c’est volontiers brutal mais très vite profitable. De façon à amener ensuite de la douceur, de la délicatesse partout. On peut opérer le massage   après nappage de miel ou huiler avec du Saint Emilion grand cru. Si le massé est coquet, il pourra demander un bout de langue en biseau avec léger retroussis. Le massage de langue terminé, le propriétaire de la bouche se sent régénéré, il parle plus fort et déblatère davantage sur ses semblables. Il tourne des phrases plus virulentes, lance des saillies plus pointues. En d’autres termes, il sera plus à même de rendre toutes les subtilités de langage dans l’art de proférer des méchancetés.

Il pourra aussi crier à pleins poumons lors des manifestations organisées contre le patronat pourri, brailler du Robert Cogoi* en maison de repos, reprendre du Bénabar en chœur ou encore siffler l’Halleluia d’Haendel en toute impunité. Ou encore fêter connement les hommages nombreux rendus à Sœur Sourire.  

Signalons enfin qu’il est formellement interdit au masseur, pendant ses heures de travail, d’user d’autre chose que des doigts. 

 

* chanteur belge des années 60, rival éphémère de Salvatore Adamo

La longue marche

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Il marchait depuis des jours. Depuis longtemps il avait quitté la terre et même le système solaire. Il volait plus qu’il ne marchait, il faut dire. En tout cas, il s’éloignait. Cela faisait des mois. Quand il se trouva aux confins de l’univers, il progressa encore. L’univers n’avait pas de fin, se dit-il. Il se serait bien arrêté pour casser la croûte mais où trouver un fast-food dans ce no man’s land et il était trop loin, beaucoup trop loin, pour faire demi-tour.

Hallelujah / L. Cohen – J. Buckley – J. Cale

La chanson de Leonard Cohen par…

John Cale

http://www.dailymotion.com/swf/x2uct4&v3=1&related=1

Jeff Buckley

http://www.dailymotion.com/swf/x1z069&v3=1&related=1

Leonard Cohen

BONUS: extrait de la b.o. de Shrek, par Rufus Wainwright

http://www.youtube.com/watch?v=9Yi1uvHy-zo&eurl=http%3A%2F%2Flesbellesphrases%2Eskynetblogs%2Ebe%2F&feature=player_embedded

 

Les paroles

Now I’ve heard there was a secret chord
That David played, and it pleased the Lord
But you don’t really care for music, do you?
It goes like this
The fourth, the fifth
The minor fall, the major lift
The baffled king composing Hallelujah

Hallelujah
Hallelujah
Hallelujah
Hallelujah

Your faith was strong but you needed proof
You saw her bathing on the roof
Her beauty and the moonlight overthrew her
She tied you
To a kitchen chair
She broke your throne, and she cut your hair
And from your lips she drew the Hallelujah

Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah

You say I took the name in vain
I don’t even know the name
But if I did, well really, what’s it to you?
There’s a blaze of light
In every word
It doesn’t matter which you heard
The holy or the broken Hallelujah

Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah

I did my best, it wasn’t much
I couldn’t feel, so I tried to touch
I’ve told the truth, I didn’t come to fool you
And even though
It all went wrong
I’ll stand before the Lord of Song
With nothing on my tongue but Hallelujah

Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah, Hallelujah
Hallelujah


———————————————–

Traduction de Jean Guiloineau

On m’a parlé d’un accord secret
que David jouait pour plaire au Seigneur,
mais tu n’aimes pas la musique, n’est-ce pas ?
La voici : le quatrième, le cinquième
le mineur descend, le majeur monte;
le roi dérouté composait Alléluia !

Ta foi était solide mais il te fallait des preuves.
Tu l’as vue se baigner sur la terrasse;
sa beauté et le clair de lune t’ont vaincu.
Elle t’a attaché à une chaise de la cuisine
elle a brisé ton trône, elle t’a coupé les cheveux,
et de tes lèvres elle a tiré l’Alléluia !

Tu dis qu’elle a pris le Nom en vain;
je ne connais même pas le nom.
Mais si je le connaissais, c’est quoi pour toi ?
Il y a un éclat de lumière dans chaque mot;
peu importe ce que tu as entendu,
le sacré ou la voix brisée d’un Alléluia !

Je fait de mon mieux; c’était bien peu.
Je ne pouvais sentir, alors j’ai appris à toucher.
J’ai dit la vérité, je ne suis pas venu te tromper.
Et même si tout s’est mal passé,
je me tiendrai devant le Seigneur des Chansons
avec sur les lèvres un simple Alléluia !

(Couplets supplémentaires)

Ma chérie, je suis déjà venu ici.
Je connais cette pièce, j’ai marché sur ce sol.
Je vivais seul avant de te connaître.
J’ai vu ton drapeau sur l’arche de marbre
mais l’amour n’est pas une marche de victoire
c’est un froid et brisé Alléluia !

Il fut un temps où tu me laissais savoir
ce qui se passait vraiment en dessous
mais maintenant tu ne me le montres plus.
Je me souviens quand je bougeais en toi
et la colombe sacrée bougeait elle aussi,
et chacun de nos souffles était un Alléluia !

Il y a peut-être un Dieu là-haut
mais tout ce que m’a appris l’amour
c’est comment descendre un type qui t’a doublé.
Et ce n’est pas une complainte que vous entendez
ni quelque pèlerin qui a vu la lumière –
c’est un froid et brisé Alléluia !

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Votre version préférée (parmi celles-ci ou d’autres)?


L’homme-objet

C’était un homme objet que les femmes se refilaient. Je te le soumets, disait l’une. Il est opérationnel, rétorquait l’autre. Il a bien fonctionné, se réjouissait une troisième. Il faudrait penser à le réparer,  se plaignait une quatrième… Il passait ainsi de main en main, vivant sa vie, tombant en panne rarement puis de plus en plus souvent. À la fin il ne servait plus à rien et la dernière femme qui en avait eu l’usage ne se résignait pas à le donner aux puces : elle s’y était attachée et il termina sa vie en homme objet de toutes les attentions.