Ordre, calme et volupté

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Il avait caressé son aimée à tort et à travers pendant des mois, des années. Et aujourd’hui qu’il était éloigné d’elle, il eût aimé la revoir ne fut-ce que cinq minutes pour la caresser avec ordre, calme et volupté.

Nouveaux métiers: repasseur de phrases

Vos phrases présentent de méchants plis, des signes de ponctuation, des parenthèses, des incises, des  mots rares, des ventuosités, elles s’allongent inconsidérément (comme celle-ci). Le repasseur de phrases vous l’étale, vous la rend aussi droite qu’une ligne de chemin de fer ou qu’un cheveu de Kate Moss. Contre un prix forfaitaire, il vous repasse un texte en un coup de paume. Il ne vous reste plus pour faire sensation devant la critique boursouflée qu’à présenter vos ouvrages au gala du beau style, au salon du texte d’apparat, au bal des livres bien. Le repasseur de phrases peut aussi, contre une somme outrancière, vous coacher pour entrer à l’Académie, d’ici vingt ou trente ans.   

Le songe

Quand le songe est tombé sur la ville, toute la vie a ralenti, la lumière freina ses rayons, les avions roulèrent à la vitesse des  voitures et les voitures à celle des vélos. Et moi qui me rendais chez toi, je n’arrivai jamais et je reçus ton message d’adieu au matin, quand le songe était passé.

Philippe Delerm / Il faut le voir sur scène

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On imagine bien à qui est destiné ce jugement que j’entends pleuvoir autour de moi depuis quelques années.  Je l’ai prononcé pour ma part de temps à autre, avec une conviction légèrement différente, car si j’éprouve un grand bonheur à voir le personnage concerné à la Cigale ou à l’Olympia, je l’apprécie autant sur d’autres scènes plus intimes de la vie.

Mais à force de récurrences, « il faut le voir sur scène » a fini par s’extraire de son contexte originel pour prendre une valeur absolue. Il y a là une forme de vérité imparable, qui me semble s’adresser à chacun. Bien sûr, c’est plus patent pour ceux qui ont des spectateurs dans l’exercice de leur métier. Je pense à telle collègue professeur de lettres, peu chanceuse dans sa vie familiale, embarrassée par un asthme chronique, mais dont j’entendais la voix derrière la cloison quad j’enseignais moi-même. Tout d’un coup, la passion l’animait,, qu’elle fût vouée à l’œuvre de Boris Vian ou à l’exaltation de la subordonnée relative, et je sentais que ça passait, que le public était conquis. Il fallait la voir sur scène.

Je dirais la même chose de mon boucher, qui a pris sa retraite, et que je croise quelquefois, étonnamment taciturne, lui qui savait distiller des petites phrases d’une sagesse liée au découpage de la bavette ou de l’entrecôte. Plus que la commande de ses clients, il maîtrisait alors le monde, entre le glaive et la balance.

D’autres scènes sont plus confidentielles encore, un jardin pour greffer des pruniers, une berge pour pêcher à la ligne, un lit pour faire l’amour. Parfois il n’y a pas de spectateurs du tout, parce que le talent de celle-ci, de celui-là réside dans la rêverie mélancolique, la lecture de Jules Renard sous lampe basse en fin d’après-midi, l’écriture d’un roman qui ne trouvera pas d’éditeur, la confection d’un clafoutis quand tout le monde dort encore. Qu’importe le public. Chacun a son théâtre, où il est en accord avec la mise en scène. Et chacun se dédouble alors, conscient d’être au plus près. Certains sont exposés, d’autres seront surpris d’être attendus, un jour. Beaucoup resteront solitaires. Pourtant, il faut les voir sur scène.

 

Philippe Delerm

 

extrait de Ma grand-mère avait les mêmes (Les dessous affriolants des petites phrases), éd. Points Seuil

Éric Dejaeger / Le seigneur des ânes

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Ce livre est publié à l’occasion du maelstrÖm reEvolution fiEstival nOmade #4 de bruxelles du 6 au 8 mai 2010

«…et ces applaudissements sont en fait une manière d’encourager les professeurs : pendant l’interruption de la retransmission, après deux ajournements et une attestation C, sept élèves de suite viennent d’obtenir une attestation A ! Je résume la situation pour les téléspectateurs qui prendraient le reportage en marche : sur 17 élèves délibérés jusqu’ici, on compte dix attestations A, une B, deux C et quatre ajournements, ce qui, finalement, n’est pas mal du tout. Mais ce n’est pas fini puisqu’il reste encore une dizaine de cas à traiter. Comme le suivant qui risque de poser un problème puisque l’élève est soupçonné d’être un dealer…»

Qui est ce Seigneur des Ânes ? Ronny Serpin, l’élève le plus épouvantable que l’enseignement ait connu et qui se targue d’avoir mis une dizaine de professeurs en dépression ? Charles Dumortier, enseignant retraité qui n’arrive pas vraiment à se dépêtrer de ses trente-sept de tableau noir ? Henri Gelker, qui traîne son feu sacré d’école en école sans vraiment arriver à l’y mettre, le feu ? À moins qu’il ne s’agisse d’une maîtresse des ânes, comme Amélie Dumortier qui doit en faire des vertes et des pas mûres devant ses élèves…

Après La cité des fleurs fanées et ses gentils héros, Éric Dejaeger revisite ce qu’il reste de l’école, un endroit où tout peut arriver, où le lendemain n’est jamais la prolongation de l’aujourd’hui. L’école, cette entité qui fait fuir la moitié des jeunes enseignants durant leurs cinq premières années de carrière. Il ne faut pas s’enfoncer la tête dans la boîte de craies : durant ces quinze dernières années, le métier de professeur est devenu de plus en plus difficile. L’auteur ne nous raconte pas ici ce qu’il en est aujourd’hui mais bien ce qu’il en sera si les dérives (appelées sournoisement «réformes») telles que les enseignants les connaissent à répétition depuis les dernières grandes grèves de 1995 continuent. Il lui semble d’ailleurs que le futur qu’il décrit dans ce livre se rapproche beaucoup plus vite qu’il l’ait prévu.

Professeur, le plus beau métier du monde ?

Pages: 112 pp.
ISBN Maelström: 978-2-87505-046-5
Format: 14×21 cm
Genre: Roman

Prix: 12 €

Le site des éditions Maeltröm

http://www.maelstromreevolution.org/pages/FRA/home.asp

Le blog d’Eric Dejaeger

http://courttoujours.hautetfort.com/