(S)C(H)OOL SONGS

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(La Maison piano est une école de musique dans une université à Huainan en Chine.)

 

LES (IN)CONTOURNABLES 

 Le surveillant général par Serge Lama 

 

QUELQUES AUTRES…

 

10 CHANSONS qui n’aiment pas l’école sur le site des Inrocks

The PIXIES – VAMPIRE WEEK-END – THE LIBERTINES – THE CLASH – KANNYE WEST – MORISSEY – THE SMITHS – THE WHITE STRIPES – BELLE AND SEBASTIAN – ANIMAL COLLECTIVE 

 

Petites HISTOIRES D’ÉCOLE (I)

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Il n’y a plus de prof fesseur, se lamente cette ado lectrice de 50 nuances de Grey.

 

Le prof pour inspecteurs : « Ouvrez vos programmes à la page une telle… »

 

 

Le professeur de Cours du Soir qui tombe amoureux d’une de ses étudiantes doit-il passer la nuit avec elle ?

 

 

Dans cette école, à la suite d’une grave pénurie d’enseignants, tous les professeurs furent remplacés par des mannequins. À la fin de l’année, on n’enregistra, par rapport aux années passées, aucun changement significatif dans les résultats.

 

 

On se demande parfois comme un directeur d’établissement scolaire peut vivre au milieu de tant de savoir sans penser à s’échapper pour respirer l’air pur de l’école buissonnière.

 

 

 

Comme les inspecteurs du guide Michelin, les inspecteurs de l’Éducation Nationale ne sont pas reconnaissables et ne déclinent jamais leur identité véritable à tel point qu’on se demande s’ils existent vraiment.

 

 

Certains profs traqueurs ne mangent rien avant d’avoir vu leur premier élève rassasié de leur savoir.

 

 

Ma femme m’a appris hier qu’elle donne cours dans la même école que moi depuis trente ans.

         Je suis désolé mais quand je suis à l’école, tu sais très bien que je ne pense qu’à mes cours…

 

 

 

Ce professeur érotomane avait eu trente-six liaisons dans l’établissement qui ne comprenait que trente-cinq femmes… Un jour, en manque, il avait pris le jeune professeur de gymnastique dont il avait, pour tout dire, plusieurs fois admiré le corps élancé dans la cour depuis sa classe de sciences naturelles où il enseignait l’accouplement des escargots.

 

 

 

Dans son petit cartable, ce professeur possède toute sa maison. Et pendant ses heures de fourche, il rentre tout entier à l’intérieur pour être comme chez lui.

 

 

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Quelle idée de programmer les cours d’éveil en fin d’après-midi!

 

Les inspecteurs se marient entre eux et font de beaux programmes.

 

 

Certains soirs, pour tromper son ennui, le directeur de cet établissement de Promotion sociale ferme toutes les lumières et les portes de sortie. Et il déclenche l’alarme incendie…

 

 

Aujourd’hui, le prof tient ses élèves par des élastiques. Ainsi, des années plus tard, quand ils ont quitté son cours, il n’a qu’à tirer le fil de Facebook pour les rappeler au bon souvenir de son savoir.

 

 

Le syllabus de ce professeur d’espionnage tient sur un microfilm.

 

 

L’étudiant qui traîne dans les couloirs est peut-être à la recherche du professeur idéal.

 

 

J’ai toujours rêvé d’avoir une prof comme ma mère. Alors, régulièrement depuis trente-cinq ans que je suis dans l’enseignement, je l’amène dans mes classe aux heures de fourche où je la fais monter sur l’estrade pour raconter sa vie, et je prends des notes.

 

 

En tant qu’instituteur, je ne sais pas si d’ici quelques années, je supporterais mieux les filles à barbe que les garçons moustachus.

 

 

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Si un jour, Joëlle Milquet devient Ministre de l’enseignement, je change de métier, disait toujours cet ex-collègue… passé depuis au cabinet de la Ministre.

 

 

Ce directeur se faisait régulièrement inspecter par ses professeurs, à tel point qu’il consulta l’inspecteur pour savoir si c’était normal. Celui-ci lui apprit que, par ordre du ministère des étudiants, l’ordre avait été inversé et il donna derechef à vérifier au directeur tous ses documents de ministre.

 

 

Si l’inspecteur écrivait (vraiment), est-ce que ça se lirait ?

 

 

Mes élèves apprécient beaucoup mon travail au tableau noir, dit cet enseignant à son inspecteur : Régulièrement, ils m’envoient des craies pour que je continue.

 

On se demande parfois comment l’inspecteur, le conseiller pédagogique, le psychopédagogue résistent à l’envie de mettre en pratique leurs conseils, leurs hypothèses, leur furieuse envie d’enseigner.

 

 

 

Quand cet enseignant parlait de façon incompréhensible, voyait des complots se tramer contre lui depuis la Maison Blanche ou le Kremlin, et écrivait plus d’une fois par heure BURN-OUT en très grand au tableau noir, la direction, mise au courant, savait qu’elle devait mettre cet enseignant en arrêt de travail pendant au moins une saison. On le remplaçait par un enseignant encore sain d’esprit.

 

 

Monsieur,

Mon fils ne connaît toujours pas bien le code de son robot-professeur. Il change continuellement. Serait-il possible d’éviter ces changements continuels, la carte-mémoire de mon fils arrive à saturation!

En vous remerciant, je vous prie de croire,  Monsieur l’administrateur des robots-professeurs, en l’expression de mes octets les plus respectueux.

 

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à suivre

E.A.

VERHAEREN, CHARNEUX & LE JAPON

L’intéressant exposé donné le 27 mars 2015 à Mons dans le cadre d’un colloque organisé par la Société des Sciences, des Arts et des Lettres du Hainaut par André Bénit, professeur à l’Université Autonome de Madrid « Emile Verhaeren et Daniel Charneux, fascination hainuyère pour le pays du soleil levant »

Ci-dessous dans une mise en images de Daniel Charneux


  

À lire: Deux ou trois choses sur mon rapport à Verhaeren, par Daniel Charneux

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COCU XÉNOPHOBE suivi de LE GRUTIER, de Denis BILLAMBOZ

Cocu xénophobe

  

Il n’aimait pas son voisin

C’était un étranger

Il avait pourtant couché avec sa voisine

Une étrange beauté étrangère

Il avait fait tout ce qu’il avait pu

Pour qu’il soit reconduit

D’où il était venu

Sans sauf-conduit

  

Allez zou le cocu aux Balkans !

 

D’un air narquois

Sa femme l’observait

Pensant à part soi

Qu’il devrait

En la matière

Rabaisser son caquet

Et se satisfaire

D’un plus discret

  

Allez zou tous les cocus aux balcons !

 

Il eut ainsi limité le risque

A un vulgaire rhume

Bien de chez nous

 

 

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Le grutier 

 

Vol de grues

Le soir sur les grues

Le grutier est indifférent

 

Vol de grue

Au coin de la rue

Le grutier est innocent

  

Vol de grues

Au parc Bellevue

Le grutier est mécontent

  

Etreinte de grue

Un jour sous la grue

Le grutier est consentant

 

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La photo centrale est de Ludovic Walsh 

La photo du fond est un selfie

LE SEXE POUR TOUS

88957_300.jpgpar Denis BILLAMBOZ

Alors que la France défile gaillardement en réclamant à cor et à cri le mariage pour tous, ces deux livres auraient plutôt tendance à nous faire remarquer que la sexualité pour tous pourrait être aussi une revendication légitime. Françoise Rey propose un roman noir qui se déroule dans une maison de retraite où les personnels s’autorisent quelques écarts de conduite bien compréhensifs quand on considère tout ce qu’ils doivent supporter dans le cadre de leur travail. Marcel Nuss, quant lui, a transcendé son lourd handicap pour se glisser dans la peau d’une jeune femme libertine et nous faire comprendre que la sexualité existe aussi chez les handicapés.

 

 

cover225x225.jpegULTIME RETOUCHE

Françoise REY (1951 – .…)

Une adolescente qui perd sa virginité en même temps que sa mère, un inconnu qui enterre un cadavre dans une décharge et surtout une maison de retraite dont les pensionnaires féminines ont une fâcheuse tendance à se jeter par les fenêtres, constituent le cadre de l’intrigue de ce roman qui réunit tout le petit monde qui gravite autour de cette institution, dans une épilogue qui révèlent tous les secrets, traumatismes et phobies que tous ces personnages cèlent en eux depuis de nombreuses années. C’est au fond du cœur, du cerveau, des tripes de chacun des acteurs de cette énigme que l’auteure va chercher les raisons de cette épidémie de suicides, ou de meurtres, qui semble s’être abattue sur cette institution gérée d’une main de fer par la Marie-Berthe, la Marie-Salope.AVT_Francoise-Rey_8887.jpeg

Un roman noir, un thriller, un récit érotique, un polar, un documentaire sur les mouroirs, leurs résidents et les personnes qui y travaillent, un peu tout ça à la fois, ce livre contient en effet une belle intrigue habilement construite, du suspense, un tableau affligeant et pathétique de la vie dans ces fameux mouroirs qui font tellement peur à tous ceux qui avancent doucement vers un âge plus respectable, et évidemment quelques scènes érotiques nécessaires dans un livre de ce genre, donc un thriller érotique qui se déroule dans le milieu des maisons de retraite pour femmes ayant perdues leur autonomie et bien souvent une bonne partie de leur raison.

ultime-retouche.jpgUn texte bien écrit, fluide, d’un style alerte qui, in fine, rend un bel hommage à tous ceux qui travaillent dans ce milieu, et qui permet de mieux comprendre qu’ils peuvent rechercher une certaine compensation sexuelle à la tension à laquelle ils sont continuellement soumis au cours de leur travail, de leur véritable sacerdoce. La partie érotique du texte reste plutôt classique et pourrait figurer dans bien des romans qui ne sont pas estampillés « érotique ».

Ce livre peut être télécharger ici au prix de 4,99 €

 

1646006-gf.jpgLIBERTINAGE À BEL-AMOUR

Marcel NUSS (1955 – ….)

Marcel Nuss, lui-même lourdement handicapé par une amyotrophie spinale, est un essayiste qui s’est particulièrement intéressé à la sexualité des personnes handicapées afin de démontrer qu’elles ont, tout comme les valides, des désirs, des envies et des fantasmes qu’elles ont toutefois plus de mal à assouvir. Pour le présent ouvrage Marcel Nuss a abandonné, provisoirement probablement, le

domaine des essais pour se consacrer à la fiction pure à travers laquelle il cherche également à démontrer que, malgré son handicap, sa libido et son imagination ne sont nullement atteintes et qu’il peut se glisser dans la peau d’une jeune femme peu farouche étalant ses désirs et ses envies sans la moindre pudeur.

Il devient, le temps de cette fiction, la belle Héloïse, une jeune femme délurée qui épouse un vieil aristocrate libidineux pour s’assurer une situation financière confortable sans renoncer à ses escapades extra conjugales. Dans un clin d’oeil à Constance Chatterley, elle finit par séduire le garde pêche de son époux et même la femme à tout faire du domaine. Après le décès de vieux comte se forme ainsi un trio tutoyant plus souvent le vice que la vertu sans pour autant importuner qui que ce soit. L’auteur dénonce ainsi ceux que Rabelais interpellait déjà à son époque dans une célèbre diatribe qui aurait pu inspirer Marcel Nuss : « Le peuple est essentiellement composé de tartufes, de petits vicieux qui s’en foutent plein la vue entre les quatre murs de leur chez-soi. De mecs qui se lècheront les babines en lisant mon bouquin tout en grognant : « Oh, la salope ! D’où elle tient des idées pareilles, cette nana ? Elle a le diable au corps » diront-ils alors qu’ils ne connaissent même pas Raymond Radiguet, les incultes ».photo?memberId=00225yv9fkdmxdpv&height=185&width=140&ts=1355308139000

L’auteur nous montre une jeune femme heureuse de jouir de son corps et de sa santé sans retenue mais n’oublie pas que tout est éphémère sur notre planète mais que ce n’est pas une raison pour renoncer aux plaisirs d’aujourd’hui. « Rien n’est jamais gagné d’avance, la vie peut s’arrêter à n’importe quel moment. Et alors, faut-il pour autant ne plus oser vivre ? Faut-il cesser d’aimer et de désirer parce que sa queue à un passage à vide ? »

J’ai été attiré par ce livre non pas parce que je doutais des capacités de l’auteur à nous livrer ses fantasmes avec le poids du handicap qui l’accable mais je voulais surtout voir comment il pouvait rédiger un texte cohérent, fluide, dans un style littéraire correct en dictant les mots un par un sur un appareil de reconnaissance vocal. Le résultat est assez saisissant, le lecteur non averti ne pourrait absolument pas croire un instant que ce texte a été quasiment ahané mot à mot à une machine qui n’a fait que de le reproduire. Rien que pour cette performance, l’auteur mérite déjà largement notre reconnaissance et nos compliments. J’ajouterai que ce texte est parfaitement écrit et qu’il peut figurer dans la bibliothèque de n’importe quel lecteur averti ou assez ouvert d’esprit.

Le livre sur le site des éditions Tabou

LES ÉCLABOUSSURES et autres poèmes

Les éclaboussures

 

tombé dans l’œil

un regard se noie

 

sur les cils

des gens voient

sans pouvoir agir

 

des éclaboussures 

d’images

 

 

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Prés prairies

 

Prés prairies sans fond

de la mémoire

soleil cher au fossoyeur

 

bardanes

pâquerettes

coquelicots

anémones

pissenlits

mangés par la racine

 

vos fleurs m’exaspèrent

 

je bois jusqu’à la piqûre

le jus d’ortie

de vos rodomontades

 

 

 

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Les mots

 

Les mots m’échappent

 J’ai beau leur courir après

 Leur offrir monts et merveilles

    Rimes mâles ou femelles

  

Les mots m’échappent

 Sans doute m’attendent-ils

  Dans un trou de souris

Dans un trou de serrure

 

Pour me faire la peau

 Me grignoter les os

Pour me rendre la mort impossible  

Pour me pendre à un croc de libraire

 

 

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Les pierres de l’enfance

 

Ma mère avant de dormir

dépose sous l’oreiller

les pierres de mon enfance

 

ce sont les mêmes qui décorent sa cour

et l’entrée de la mer

ce sont les mêmes qui parlent aux mains

et aux rivières

 

tout en tendant l’oreille

vers le porte-voix du passé

je me repose sur elles 

pour encore vieillir 

 

 

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Ce n’est pas vrai

 

ce n’est pas vrai que les souvenirs nous construisent

il est des murs à détruire bien plus édifiants

qu’une enceinte de mots

qu’un précipice de sons

donnant sur une symphonie vide

 

nous ne sommes pas faits que d’essence de phrases

il nous arrive d’être pierre d’espace

mur d’absence

fenêtre ouverte sur la déraison

ouvrage multiple dans les doigts d’un ange

 

nous allons au-devant de fumées

qui nous cachent un feu de cendres

mais derrière l’écran une main se tend

que nous n’espérons pas et que nous oublierons

par manque de mots pour retenir

 

dans l’océan d’ombres où meurent les jambes

l’action de marcher de parler de s’étendre

le rêve de caresser le plus grand nombre ;

un bateau de lumière épelle

une à une les lettres de notre être

 

s’il fait silence je meurs nu sur cette page   

je marque d’un point

l’absence de droite infinie

 

 

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Les poumons de la terre

 

né de l’étouffement

de la nuit

 

le souffle de l’aube

a grandi tout le jour

 

éclairant les poumons

de la terre

 

jusqu’à l’expir

 

tant que je t’étranglais

de joie

 

et que j’allongeais mon repas

vers ta faim

 

tu pouvais prendre

comme je voulais

  

ton plaisir

 

 

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En chemin

 

à l’appel du poème

les mots se lèvent

 

et se dirigent là où

ils ont entendu du bruit

 

parfois ils se perdent en chemin

et ne retrouvent pas la route du dictionnaire

 

alors ils font là où ils sont

un semblant d’histoire

 

ou un poème

 

 

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Le platane et l’olivier

 

Le platane plane

sur une feuille d’olivier

 

Quand la flamme prend

à la racine des jours

 

c’est le fruit qui flambe

dans le souvenir

 

Propulsant l’arbre volant

dans un passé non identifié

 

De mémoire de forêt

aucune aurore jamais

 

Aucun nuit n’a été recueillie 

dans un seul panier de rêve

 

 

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La neige

 

La neige qui tombe

À gros flocons

Racle les images

De ta mémoire

 

Tu revois ton enfance

A la faveur du blanc

Tu revois tes rêves courant

Sur le miroir de la nuit

 

Toi seul pressens leur chute

Au petit matin

Sur le lac gelé

D’un souvenir

 

 

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Le mécanisme de la sucette

 

Régulièrement

Sans souci du qu’en sucera-t-on

Je suce ma mère

Le souvenir de la jeunesse de ma mère

 

Qui à force prend la forme

D’une femme à croquer

À débiter en morceaux de charme

Lors d’un festin aux allures de dépeçage

 

Quand j’ai tout avalé

Jusqu’aux dents de sagesse

Je lave toutes les traces de sang

Pour que mère ne me dispute pas

 

Malgré toutes ces précautions

Qui devraient pourtant m’honorer

Me valoir quelques compliments

Ma mère me fait la tête

 

Elle me reproche de l’avoir oubliée

D’avoir troqué sa mémoire

Contre une forme aléatoire et passablement juvénile

En bon fils j’approuve chacun de ses dires

 

Je suce et resuce à nouveau

Comme si je n’avais pas bouffé à ma guise

 

 

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Les langues étrangères

 

Les langues étrangères

Pour quoi faire?

Se lamente mon père

Dans la terre 

 

Pour parler avec les limaces

Et les vers et tous les animalcules

Les os voisins et minéraux divers

Les corbeaux qui ont du baratin

 

Mais je sens bien

Que je ne suis pas convaincant

(Moi qui vous parle

Je n’en ai retenu aucune)

 

Papa ne répond pas

Sinon par le silence

Et je m’en vais sans rien dire

Par le fond de l’allée

 

 

 

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avant d’écrire

arrose ta prose

et vérifie tes vers

on n’est jamais

 assez prudent

 

avant d’écrire

soupèse le nuage d’écrire

et s’il est trop vague

laisse-le au ciel

 

 prends un peu de terre

pour tes tourments

pour tes poèmes

 

avant d’écrire

prends l’air

et rends le vent

glissant 

comme la plume

 

 E.A. 

ROUGE RÉSIDUEL d’André DOMS & Pierre TRÉFOIS

28001100412040L.jpgCourse de la ligne à travers les sens

Deux artistes naviguent ici de conserve, l’un, écrivant, l’autre, dessinant les teintes et les nuances dans les entrelacs, pour ce qui s’apparente à une course de la ligne à travers les sens. Jeux de mots sur ces bornes visuelles qui cadrent et déploient nos images propres. Réseaux, résilles propres à saisir les couleurs dans leurs filets.

On assiste à des lignes qui en brouillant, voulant comme effacer leur traces engendrent des volumes, des images, glissent de la deuxième à la troisième dimension dans un entre-deux dimensionnel qui trouble, séduit et interroge.trefois.jpg

doms2.jpgLe poète, lui, est amené à « interpréter à faux », sans assurance. Il voit tour à tour un « décor de cruauté », et, entre vue aérienne et « broussaille de chiendent », des terres submergées, des moutonnements de nuages, des percées d’astres, des trouées de lumière dans un embrouillamini des quatre éléments.  Appelés à former une cosmologie singulière, une cartographie âpre et (re)belle. 

La matière verbale s’agglomère, les mots comme les traits se répondent de proche en proche, se contaminent: Rien, brin… comble, combe… confins, confiants… expose, explore, explose… 

Comme les lignes, les mots s’attachent pour former des chaînes de signifiants, des maillons plutôt, peinant à composer une suite car, peut-être le réel, aujourd’hui, n’est plus théorisable, l’objet d’une pensée unifiante.

C’est par éclairs l’image d’un homme qui surgit au centre de ces écheveaux car au fond il s’agit toujours de l’homme en questionnement qui répond à un doute pour une vérité relative à la vision d’un monde en constante métamorphose, qui prend avec les mots les formes qu’on meut.

Au fond, le rouge résiduel, persistant peut aussi bien être sang d’encre  résistant à l’épreuve du dessin que ces marques sans dessein qui enflamment nos esprits, notre besoin d’histoire et de vérité.

Pierre Tréfois et André Doms nous donnent un beau livre-objet qu’on a plaisir à regarder et à lire.

Éric Allard

Pour acheter ce livre

Le livre sera présenté ce jeudi 26 mars à 19 heures en présence de ses deux auteurs, avec la complicité d’Alain Dantinne, dans le cadre de la librairie-galerie Livre & Art de Louvain-la-Neuve.

LE BUNKER de THIERRY RADIÈRE

image165.jpgEnfermements

Une catastrophe nucléaire vient d’avoir lieu. Parmi d’autres personnes, une partie des artistes européens, au nombre de vingt-huit, un par pays, réunis dans un bunker pour promouvoir l’art européen, est sauve mais pour combien de temps ? Un écrivain apporte un premier témoignage. Il écrit depuis toujours ou presque. Et il continue, il continuera jusqu’à la fin. À l’encontre d’autres artistes, dévastés, qui ne croient plus, dans ces circonstances, à leur art. Quelques-uns des rescapés se découvrent croyants mais désormais ils sont comme incroyants en leur art qu’ils vénéraient tant avant la catastrophe.

Un d’eux se retranche dans une des pièces du bâtiment souterrain avec l’intention d’en finir et, avant, il gueule : On n’est pas allés assez loin dans nos œuvres , et ça, c’est regrettable!

Le témoin des lignes qu’on lit continue, imperturbable. Il écrit comme il respire. Il écrira même, les yeux fermés. La situation l’entraîne à encore plus de rigueur, mais non à renoncer à écrire: il se plongera dans ses souvenirs pour aiguiser davantage son regard et sa perception du monde.

Et pourtant, écrit-il, que de similitudes entre l’enfermement physique et celui qu’engendre la création !

Il note le commentaire d’un survivant sur ses livres : pas assez sensuel ! Mais la sensualité est-elle essentielle ? N’est-elle pas comparable à l’émotion, à la sincérité dont se prévalent tant d’artistes ? Ce qu’il décrit là, dans ces circonstances funestes, n’est pas sensuel : les crises de désespoir, les corps de plus en plus souillés, versant dans la mort, cette rixe sanglante qui oppose deux artistes… On peut avoir toujours écrit et s’être cependant trompé, écrit-il en substance, mais l’important, c’est de persister car la pire des choses serait de se croire arrivés.

Dans les écrits en prose de Radière, certaines circonstances poussent des Radi%C3%A8re-Thierry-e1406018153430.jpgquidams, souvent des taiseux, à prendre la parole, en écho à leur voix intérieure « toujours vivante, impossible à taire », et ils se mettent à parler, ils écrivent comme ils parleraient. Ce sont des voix qui sont données à entendre dans les livres de Radière.

À partir de cette situation de départ définie par l’éditeur Jacques Flament, d’autres auteurs vont donner la parole à d’autres témoins de cet événement.

Ce canevas, c’est du pain bénit pour Thierry Radière, écrivain du huis-clos et de l’enfermement, sur lequel il tisse une narration à hauteur d’homme qui rappelle aussi bien Le Terrier de Kafka que les Carnets du sous-sol de Dostoïevski. Mais certainement aussi Le lecteur inconstant de Carlos Liscano, cité dans le récit.

Et c’est vraisemblable ; on partage les visions et les interrogations de ce narrateur prisonnier plus encore de son besoin d’écrire que de la situation car, lit-on de la main de ce narrateur resté sans nom, la fiction appartient au réel, elle est une subtile excroissance de ce dernier et je pense sincèrement que nous n’inventons rien quand nous écrivons.

Depuis ce premier témoignage, deux autres sont parus, signés de Laurent Herrou et de Benoît Camus.

Éric Allard 

Thierry Radière sur le site des éditions Jacques Flament

Le bunker sur ce même site

UNE VIE DE VOLEUSE

Lola Lafon est née en 1975, elle a publié quatre romans et a sorti deux albums de chansons.

Une vie de voleuse (d’après une phrase de Lou Andréas-Salomé)

Une vie pour errer, une autre pour rien en faire
Une pour lire le matin, moi j’aime lire au réveil
Une vie pour courir sans qu’il n’y ait personne derrière
Une vie pour faire erreur ou même plusieurs

Une vie pour errer, une autre pour rien en faire
Pour s’inquiéter du ciel comme on s’inquiète d’un frère
Une vie douce et conne juste un peu plus légère
Une vie aux aguets sans abri intérieur

Une vie pour déposer des larmes sur les pierres
Une vie si je meurs
Une vie pour se consoler d’avoir grandi
Une vie pour écrire tout ce qu’on prévoit d’en faire

Une vie pour l’immense addition qui s’opère
Une vie évasive à ne répondre de rien
Une vie d’arbre évadé de toutes les forêts
Une vie de voleuse

Une vie de voleuse
Une vie si tu veux en avoir une, vole-la !
Une vie si tu veux en avoir une, vole-la !
Vole-la…

 

Son portrait sur le site d’Actes Sud

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LA PETITE COMMUNISTE QUI NE SOURIAIT JAMAIS de LOLA LAFON

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Lola Lafon raconte Nadia Comaneci, la première gymnaste à avoir obtenu une cote de 10/10 pour sa prestation aux J.O. de Montréal (elle a dérouté l’ordinateur qui n’avait pas dans son programme le nombre 10, elle croit voir 1,00 et se demande pourquoi cette note quasi nulle), de sa découverte en 1969 (Nadia a huit ans) par Béla Karoly, un ancien boxeur, à Onesti, au Nord-Est de Bucarest, jusqu’à sa fuite aux USA un mois avant la chute de Ceaucescu.

La partie la plus étonnante, la plus cruelle n’est pas celle qui raconte la vie de Nadia en Roumanie mais la façon dont, après sa fuite du pays, elle sera accueillie aux Etats-Unis et exhibée, jugée comme un monstre de foire. Cette seconde partie m’a fait penser, je ne sais trop pourquoi, au Grand Théâtre de l’Oklahoma de L’Amérique de Kafka (où, cela dit, l’écrivain tchèque n’était jamais allé).

Lola noue dès le début un dialogue imaginaire avec Nadia Comaneci qu’elle n’a pas rencontrée pendant l’écriture de son roman. Si elle le fait, on comprend que c’est pour ne pas verser dans « son arrogance occidentale » (même si Lola Lafon a grandi en Roumanie) ou laisser libre cours à une imagination typiquement romanesque qui lui ferait inévitablement inventer une psychologie à Nadia, des pensées, des intentions, des sentiments… à la gymnaste.

Une sorte de délicatesse l’en empêche, elle ne veut pas interpréter la vie de quelqu’un d’autre.
Ce dispositif l’en préserve, c’est ce qui fait l’intérêt de ce livre mais aussi ses limites. Car, au bout du compte, elle ne fait que se retenir aux faits d’une vie et ce que ce qui en a été dit.

Ainsi, elle nous épargne, comme nombre de biographes classiques le font, une vie inventée, plus rêvée que celle vécue mais, en revanche, elle nous laisse avec l’image d’une Nadia, d’une part, concentrée sur ses objectifs sportifs, pour ne pas ressembler à la masse des adolescentes de son âge (les petites filles des années 70), et d’autre part, d’une personne influençable, à la recherche constante de managers, lui indiquant les grandes lignes de son existence. 

C’est aussi un livre sur l’incapacité à se définir politiquement, entre libéralisme sauvage et communisme, suivant le régime qu’on endure.

Un livre, au final, qui, pour bien faire, ne pas donner une image fausse de la « véritable » Nadia, n’apporte pas grand-chose à la légende qu’elle a colportée malgré, il faut le souligner, l’intense écriture de Lola Lafon.

Eric Allard

 

Lola Lafon parle de son livre

Nadia Comaneci dans ses oeuvres