
Poésie (3)
Selon le même attrait que l’aimant pour sa cause, l’amant retient toutes les sensations, tous les sentiments qui ont noué sa vie à celle des autres. Ainsi en va-t-il de la sensuelle physique, et la mémoire, en quatrains, scande ces corps qui se soudent, s’échappent, reviennent, à la force des attraits.
Le poète Delcorte, que j’ai lu depuis douze livres, sait nommer avec délicatesse, et aussi de temps à autre avec un sens aigu du cru, du nu, de l’obscène, du vécu, cet amour qui « s’immisce au contact des peaux », la beauté des corps qui jouissent (« errer dans les corps »), le « sexe arqué dans ma main », « tu m’as entraîné dans ton sillage de sable » semble le fronton d’une poésie tout entière au jeu de l’amour « au fil des chambres d’hôtel ».

C’est une poésie, pleine de corps, comme on le dit d’un vin, « le goût de ta peau », « l’amour neuf abordant mon cœur » ou « langueur mitoyenne de l’amour » ou encore « oublier la mort au rouge de tes lèvres ».
Poète sensationniste (« chaque mot une sensation/ chaque sensation va au cœur »), Delcorte relate sa vie en amour, étale « le premier soleil (qui) décroche des syllabes sur ton front » ; vit « d’un claquement de cils tu rebrousses la nuit ma main dans la tienne l’autre en territoire équatorial nous inversons les grandes marées ».
Sensible aux voix, aux peaux, aux échanges, le poète remmaille toutes les fibres des amours passées et présentes, nous en donne à lire l’écheveau sensuel, hardi.
Arnaud DELCORTE, Aimants + Rémanences, éd. Unicité, 2019, 120p., 15€.
Le recueil sur le site d’Unicité
Arnaud DELCORTE sur le site de l’AEB