
Le raconteur de cœurs se distingue du raconteur de c(arabist)ouilles. Même si l’objet sur lequel se portent les racontars est sensiblement de la même forme quoique de dimensions différentes, l’un sert à la reproduction, l’autre à l’entretien de la vie. Si la distinction est faible, elle n’en est pas moins essentielle.
Le raconteur de couilles consigne des histoires de spermatozoïdes, forcément vi(ri)les et virales même si, d’après une légende pubienne, un seul finira la course en tête. On ne prête qu’aux vainqueurs. Le raconteur de couilles est volontiers trivial, tribal et balourd. Il a une tête de testicule mais sans cerveau, ce qui lui donne un crâne plat appréhendant le monde de façon binaire. Il aime l’entrefesse et la compagnie, les festivals et la cochonnerie. Il s’aide volontiers d’adjuvants pour mieux raconter, mieux saouler. Il croit mâlifier l’existence, alors qu’il ne fait que l’abâtardir, la rabaisser, la porter six pieds sous terre. C’est un fossoyeur de la joie.
Le raconteur de cœurs narre des histoires d’artères et d’aortes, de veines et de ventricules, de pression sanguine, de valves qu’on ouvre et qu’on claque, d’oxygénation en milieu fermé ; c’est plus technique et moins bandant. On peut aussi y voir des branches et des racines nouant des liaisons. Le raconteur de cœurs ne s’afflige pas, il laisse cela aux rapporteurs de calembredaines, aux avaleurs de couleuvres et de comploteries. Il n’évite pas les sujets qui lâchent et peinent les cœurs. C’est un matérialiste pur jus. Avec lui, pas d’effusions inutiles, pas d’orgasme existentiel : il laisse les illusions au bagnard. C’est un spinoziste convaincu.
En adepte du libre arbitre, La Fabrique des Métiers vous fournit tous les éléments pour faire votre choix entre les deux raconteurs.
Mais entre l’emmielleur et émulateur, on sait bien pour lequel vous opterez.