LE VIEUX QUI MÂCHONNAIT DES RELIGIEUSES de JEAN PÉZENNEC (Cactus Inébranlable) / Une lecture d’ÉRIC ALLARD

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L’an dernier, Jean Pézennec avait publié au Cactus Inébranlable un recueil d’aphorismes fort remarqué, Tarte aux phrases.

Pour preuve, trois aphorismes tirés de l’ouvrage :

Personne ne possède la science infuse. En revanche, nombreux sont-ils à posséder la science confuse.

La politique, la seule activité qui donne aux hommes de soixante ans l’illusion qu’ils ont l’avenir devant eux.

Vous voulez échapper au tourisme de masse ? Faites un voyage intérieur.

On le retrouve avec plaisir dans le genre du texte court avec L’homme qui mâchonnait des religieuses.

Dans le premier texte du recueil, un homme est expulsé malgré lui du ventre de sa mère. Dans un autre, une femme s’échappe d’un tableau de Picasso ; à la suite de quoi elle devra subir « une pénible série d’opérations de chirurgie réparatrice destinées à lui redonner forme humaine ». Dans Erreur d’aiguillage, un homme se découvre personnage d’un roman qui n’est pas le sien. Conséquemment, dans Le crédit, ce sera la vie qui s’enfuira d’un être humain.

Pézennec montre ainsi que l’existence n’est qu’une suite de lieux d’enferment dont il s’agit de s’évader ou de se faire exfiltrer.

La mini-série After death dénonce avec humour la propension qu’on a à tirer plaisir de tout, jusqu’après sa mort, en s’exonérant ainsi de toute angoisse.

Il ironise de même sur la spectacularisation de nombreux domaines de la société. N’est-ce point la peur atavique d’être confronté à soi-même qui pousse l’homme à rendre de plus en plus poreuse la frontière séparant le privé du public, laisse entendre l’auteur.

On peut penser que Pézennec sait de quoi il parle quand il écrit ici Le talk-show ou L’humoriste car il a dû approcher le monde des médias quand il écrivait, parallèlement à son métier d’enseignant, des sketches pour le café-théâtre et la télévision. Il stigmatise par ailleurs cette tendance à (faire) rire en toutes occasions, et jusqu’aux plus dramatiques : guerres, massacres, états de fait des dictatures…

Quelques textes raillent allègrement notre rapport au net et aux réseaux sociaux.

À votre bon cœur, messieurs dames ! Tout au long du boulevard du Net, pitoyable spectacle et véritable cour des Miracles, des auteurs montraient qui, un poème rachitique qui une prose difforme, tendant au passant leur sébile pour qu’ils y déposent un like ou un compliment.

(À votre bon cœur)

Le milieu littéraire, déjà égratigné dans le texte précédent, en prend plusieurs fois pour son grade.

 « Le cœur ! C’est cela l’important. ! Le cœur ! » clamait sans cesse cet écrivain. Il fallut l’interner Il avait fini par se prendre pour une laitue. »

(Le cœur, tout est là !)

Mathématicien de formation, Jean Pézennec a écrit des livres de vulgarisation scientifique. On en trouve écho dans ce recueil avec quelques microfictions dont celle qui questionne la collusion entre l’art et la science, quand toutes les opinions se valent au prétexte de la fantaisie, de l’art, motifs qui font aussi le nid du complotisme.

Tous artistes ! Et tous mathématiciens ! Le slogan remporta un succès immédiat auprès du grand public. Bientôt un débat fit rage dans le pays. La moitié des mathématiciens prétendait que deux plus deux font quatre, l’autre moitié soutenait que deux et deux font trois.

(Tous artistes)

On relève plus d’une perle de narration extrêmement concise, telle celle-ci :

« Cet homme est fou à lier », décréta le psychiatre après avoir longuement interrogé ce malade qui se prenait pour un morceau de sucre. Puis il le mit dans son café.

(Fou à lier)

D’autres nombreux textes surprenants, spirituels, grinçants de Jean Pézennec, d’autant plus percutants qu’ils sont courts, vous attendent dans ce nouveau titre de la collection des Microcactus.

Le recueil sur le site du Cactus Inébranlable

Où on parle du recueil de Jean Pézennec dans Ouest France

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LE CACTUS INÉBRANLABLE FÊTE SES DOUZE ANS le 6 MAI à AMOUGIES

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Cela se passera le 6 mai à 14 heures sur le site du Péché Mignon, 19 rue Caumont à Amougies, un ancien restaurant où l’on sera bien.

Plus de 40 autrices, auteurs et contributeurs sont attendus

Adrienne Dizier, À l’Arrache, Dominique Watrin, Émelyne Duval, Éric Allard, Éric Dejaeger, Fabienne Lorant, Francesco Pittau, François Laurent (ex Ami Terrien), Franz Griers, Gaëtan Sortet, Ivan Godfroid, Jacky Legge, Jean-Loup Nollomont, Jean-Luc Dalcq, Jean-Philippe Convert, Jean-Philippe Goossens, Jo Hubert, Joaquim Cauqueraumont, Karel Logist, Massimo Bortolini, Marc Menu, Mario Alonso, Michaël Lambert, Michel Delhalle, Mickomix, mirli, Mix ô ma Prose, Pascal Weber, Patrick Henin-Miris, Paul Lambda, Paul Guiot, Philippe Simon, Pierre Stival, Robert Varlez, Serge Basso de March, Théophile de Giraud, Tristan Alleman, Thierry Roquet… et, bien sûr, Styvie Bourgeois et Jean-Philippe Querton !

Au programme, bien sûr, à boire (Chimay bleue pour tout le monde ?) et à manger (on parle d’un pain-saucisse revisité…), mais aussi une librairie éphémère, des dédicaces en pagaille, une exposition sous forme de lessive d’aphorismes, des lectures, de la musique, des performances, des surprises… de l’ambiance, quoi !

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On compte sur vous, merci d’informer au plus vite de votre présence, soit par retour de mail ou via un SMS au 0497/76.35.55.

Le site des Cactus Inébranlable Editions

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LE PETIT GOÛT SUCRÉ DU PIRE d’ADRIENNE DIZIER (Cactus Inébranlable) / Une lecture d’ÉRIC ALLARD

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Avec Le petit goût sucré du pire, Adrienne Dizier donne son premier livre, un recueil d’aphorismes qui fait joliment signe vers la poésie du quotidien, en disant le doux-amer d’une existence un rien désoeuvrée (« Je ne sais pas quoi faire de ma vie quand je ne suis pas chez le psy ou sur mon tapis de yoga. ») d’une trentenaire qui « flotte dans [sa] vie comme dans un pantalon trop grand », en partageant son espace tendre avec un chat qui lui « ramène plus d’aphorismes que de rongeurs ».

D’emblée, pour installer l’hôte lecteur dans sa bulle élective, elle cite au gré d’un phrase Doris Day, Francis Cabrel, Françoise Hardy, Marina Abramovic.  

Les coups du sort, les affections qui sont le lot de chacun de nos jours comme des siens sont comme amortis par les notations qu’elle en tire avec une discrétion qui vire à l’élégance. Elles sont autant de messages personnels (« Si tu crois un jour que tu m’aimes »), sur un ton désinvolte qui n’évite pas la gravité de l’existence. 

Vivre d’espoir me désespère, écrit-elle justement.

Ou bien : Triompher de sa journée, miracle quotidien.

Et : Je rêve d’une vie de mère au foyer dont mes enfants seraient mes livres.

Mais aussi : Mes mots me ressemblent, avec leurs petites têtes d’anges déçus.

Dans ces pages, il y a beaucoup de marques de tendresse mais aussi quelques échappées plus fiévreuses dans le registre de l’intime.

Et des amorces d’intrigue comme celle-ci : Je me pensais célibataire avant de tomber sur cette brosse à dents inconnue.

Adrienne Dizier parle d’un nez enrhumé comme d’un petit avion / dont les ailes sont amochées. Une fête d’anniversaire est pour elle l’occasion d’avoir une bougie de plus pour éclairer le chemin.

Elle écrit : C’est seulement quand j’ai levé les miens que j’ai vu que le ciel me mangeait des yeux.
Il faut croire que le ciel a bon goût, le petit goût sacré du meilleur ?

Ce délicieux recueil d’aphorismes est le centième publié par les Cactus Inébranlable Editions en douze années d’activité, et c’est bien qu’il soit le fait d’une jeune femme qui débute dans la littérature sous les meilleurs auspices.

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Adrienne Dizier, Le petit goût sucré du pire, illustration de couverture : Emelyne Duval, Cactus Inébranlable, 2023, 10 €.

Le recueil d’Adrienne DIZIER sur le site du Cactus Inébranlable

LES 100 P’TITS CACTUS sont ICI

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Pour commencer 2017: BONNES NOUVELLES DE BELGIQUE

arton117866-225x300.jpgpar Denis BILLAMBOZ

À l’occasion de la rentrée de janvier, Cactus inébranlable a sérieusement dynamisé sa nouvelle collection « Nouvelles » lancée en 2016, en publiant trois nouveaux recueils. J’ai déjà évoqué celui de Lorenzo Cecchi, je vous présenterai donc aujourd’hui ceux d’Anne-Michèle Hamesse, Ma voisine a hurlé toute la nuit, et celui proposé par Jean-Phippe Querton, T’as des nouvelles de JPé ?

 

113716423.jpgMA VOISINE A HURLÉ TOUTE LA NUIT

Anne-Michèle HAMESSE

Cactus Inébranlable

Je suis sûr qu’Anne-Michèle Hamesse ne m’en voudra pas, si je dis que dès les premières lignes de ce recueil, ma mémoire m’a proposé le nom de celles que j’appelais il y a une ou deux décennie « mes chères vieilles anglaises » (vieilles elles ne l’étaient peut-être pas plus que moi) quand j’ai traversé, dans mes lectures, une période britannique. Ainsi, des noms ont ressurgi dans ma tête : Barbara Pym, Mary Wesley, Muriel Spark, Elizabeth Taylor… avec des souvenirs de lecture très agréables. L’air de rien, derrière un texte bien lécher, elles possédaient la férocité ces braves dames, elles savaient insidieusement distiller le venin, elles connaissaient à merveille le petit monde qu’elles mettaient sur le grill qui leur servait de scène. Elles avaient l’œil infaillible et la plume impitoyable, j’ai retrouvé un peu ces caractéristique dans les nouvelles d’Anne-Michèle quand elle dresse le portrait sans concession de dames plus toute jeunes, pas toujours gâtées par la vie, parfois un peu dans leur petit monde, ailleurs… qui ont des problèmes à régler avec leur entourage, leur histoire, le sort qui leur a été réservé.amh.jpg?fx=r_550_550

Ces héroïnes sont surtout des femmes qui ne peuvent plus supporter la vie qu’elles mènent, elles sont arrivées à un point où il faut qu’il se passe quelque chose, qu’elles prennent leur vie en mains pour remettre leur existence dans le bon sens. Mais, même si elles prennent des décisions irrémédiables, brutales, diaboliques, dignes de Barbey d’Aurevilly, leur férocité se brise souvent les dents sur la carapace des aléas. Ainsi, la petite sœur toujours méprisées n’aura pas la vengeance qu’elle serrait dans sa poche, elle a trop attendu. Trop tôt, trop tard, à contre temps, ailleurs, dans un autre monde,…, elles ratent toujours leur objectif. Ainsi va la vie, c’est le hasard qui tient les cartes dans ses mains, les rêves restent souvent dans le monde fantastique où la magie peut tout changer, mais hélas s’éteignent au réveil.

Anne-Michèle Hamesse voudrait-elle nous faire comprendre qu’il est inutile d’essayer de se rebeller contre le sort qui nous est infligé et que nous devrions tout simplement le subir pour mieux le supporter ? Il est sûr qu’à la lecture de ces nouvelles, on comprend vite qu’elle n’a pas une confiance illimitée en l’humanité qui distille la méchanceté à flots généreux. Elle croit plus dans le sort qui sait coincer le grain de sable diabolique qui dérèglera la machine de n’importe quelle histoire, de n’importe quelle existence.

Avec son style limpide, académique, précis, appuyé sur des phrases plutôt courtes même si elles sont suffisamment longues pour être souples et agréables à lire, l’auteure livre dans ce recueil une dizaine de nouvelles qui démontre ses talents de conteuse. Elle sait très bien raconter les pires histoires, créer des personnages diaboliques, sans jamais sombrer dans la vulgarité ou l’approximatif. En toute innocence, elle peut laisser supposer les pires horreurs comme savais si bien le faire mes « vieilles anglaises ». Il y a aussi dans ses textes très souvent une dimension charnelle qui confère une plus grande véracité aux histoires racontées et une plus grande réalité aux personnages mis en scène. J’ajouterai que j’ai détecté quelques zeugmes du plus bel effet, judicieusement placés comme pour donner encore plus de nerf au texte.

Le livre sur le site du Cactus Inébranlable

 

couverture-t-as-des-nouvelles-de-jpe.jpg?fx=r_550_550T’AS DES NOUVELLES DE JPé ?

Jean-Philippe QUERTON

Cactus inébranlable

Jean Philippe Querton, JPé, a fait le ménage de son bureau, vidé les tiroirs, délesté les étagères de toute la paperasse qui les encombrait, nettoyé le plan de travail de tout ce qu’il avait laissé s’accumuler au fil des ans passés à lire et à écrire. De cette tâche harassante, il a récupéré une pile de papiers en plus ou moins bon état dont il a extirpé des bouts de texte, des ébauches de texte, des idées de texte griffonnées sur des morceaux de papiers très divers, des bribes de textes et même des textes attendant juste une opportunité pour se glisser dans un recueil personnel ou collectif. Après une sélection minutieuse, il a retiré de cet amas de paperasses vingt-neuf textes plus un (le dernier étant peut-être celui qui a été écrit juste avant la publication de ce recueil quelques jours seulement après la mort de Léonard Cohen) qu’il a transformés en vingt-neuf nouvelles plus une qui constituent ce recueil.

Je connaissais le JPé jongleur de mots, aphoriste averti et talentueux, amateur de la formule fulgurante, comme il le dit lui-même : « Je suis un dénoyauteur de mots, un dépiauteur de phrases, un désosseur de langage, un décortiqueur de sens. Je dépouille, je dépapillote, je dévêts… Détrousseur, dépeceur, spolieur ». Mais dans ce texte, j’ai découvert un JPé que je ne connaissais pas, le JPé conteur, celui qui sait à merveille raconter des histoires, les histoires qu’il a pour la circonstance transformées en nouvelles. Ces nouvelles récupérées lors de sa séance de tri sont évidemment très différentes. « Ce sont des textes écrits dans contextes bien différents, dans des moments particuliers de la vie et si certains transpirent la souffrance, l’amertume, d’autres font état d’un goût pour l’absurde qui plonge ses racines dans une forme de rejet des conventions et une insouciance bienfaisante ».Querton.jpg

« Il y en a qui relèvent du burlesque, d’autres sont bien noires et sans doute que certaines évoqueront une forme particulière de romantisme, sans noyer le lecteur dans l’eau de rose ». Je dois dire que ce recueil m’a ému car entre les lignes de ces nouvelles, j’ai vu un homme face à la vie, à ses doutes, à ses certitudes, un homme parfois fort, parfois fragile recherchant le réconfort dans le cocon familial ou au cœur de sa tribu, ceux qui l’ont édité beaucoup moins nombreux que ceux qu’il a édités. Même ses coups de gueule, ses colères, sa répulsion à l’endroit de l’argent et de tous les pouvoirs, surtout religieux, qui abusent de la crédulité des foules, contiennent une humanité émouvante. Mais j’ai retrouvé aussi le JPé gouailleur, insolent, impertinent, incapable de retenir le bon mot, la formule qui percute. Je dois avouer que certains textes m’ont franchement fait marrer comme celui dans lequel un gamin admire ses parents pour avoir, en 1968, eu la géniale idée de virer les pavés de la plage.

Sans flagornerie ni fausse-pudeur, JPé dessine ainsi, à travers une trentaine de textes pas très longs, le portrait d’un homme amoureux des lettres, des mots, des beaux textes, défenseur de toutes les causes pouvant rendre sa dignité à l’humanité souvent bousculée par des pouvoirs abusifs et cupides. Parfois, il se livre à nu, d’autres fois, il se cache derrière des personnages issus tout droit de son imagination mais toujours on retrouve ce fin lettré un peu bougon amoureux des lettres et surtout des hommes sans oublier les femmes évidemment.

« Le rêve, la vie imaginée, construite comme un roman. Je suis l’écrivain de ma propre existence. J’ai les pleins pouvoirs et je veux décider de tout ».

Le livre sur le site du Cactus Inébranlable

RENTRÉE LITTÉRAIRE 2016: CACTUS SORT SES PIQUANTS

arton117866-225x300.jpgpar DENIS BILLAMBOZ

La rentrée littéraire ne concerne pas que les romanciers, les auteurs de textes courts, aphorismes et autres formes de jongleries avec le langage et les mots ont aussi fait la leur. Et, en la matière, le grand spécialiste, c’est désormais le célère Cactus inébranlable qui a publié pas moins de sept recueils simultanément pour cette rentrée, non pas parce que c’est la rentrée littéraire pour les médias mais surtout parce que c’est son métier et aussi sa vocation et sa passion de faire connaître ces auteurs talentueux et trop méconnus. Je vous propose aujourd’hui une première livraison de trois recueils qui m’ont certes diverti mais qui m’ont surtout enchanté. Les maîtres du langage ne sont pas morts !

 

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L’ESPRIT FERA PEUR!

Cactus inébranlable

Mick c’est évidemment Mickaël mais omix ce n’est certainement pas Serré, alors c’est peut-être komix ou alors comix comme les fameux dessins que Wikipédia définit comme : « Le terme (qui) sert à désigner la bande dessinée underground américaine. Il a été forgé en remplaçant par un « x » les deux dernières lettres du mot « comics » (« bande dessinée » en anglais) afin de souligner l’importance de la sexualité dans ce courant de la bande dessinée ». Alors, on pourrait supposer que Mick c’est Mickaël qui décoche les « Faux adages et vraies maximes » annoncés par le sous-titre de ce recueil et que komix c’est Serré celui qui tient le crayon qui dessine les jolies illustrations, un peu polissonnes, qui agrémentent les pages de cet opus.

Mickomix, d’après le titre cherche à effrayer le lecteur en lui décochant des adages totalement bidon :

« Con pétant. Con sentant »

Et des maximes qui ne sont pas toujours totalement fausses :

« C’est quand on s’éteint qu’on voit la lumière au bout du couloir ».

Mais tout cela n’est qu’humour et espièglerie, l’essentiel reste que Mickomix est un expert en blague en tout genre, qu’il manipule les mots, l’aphorisme et l’assonance dont il joue comme certains du pipeau. Il se définit lui-même, selon l’éditeur, comme « … artiste athée, mais créant ».a-mons-2017.jpg?fx=r_550_550

Mick flingue les mal pensants qui pourrissent la vie des honnêtes citoyens :

« C’est dans les bas-fonds

d’investissement que nagent les

requins de la finance ».

pendant que Komix, lui, se régale en diffusant des aphorismes coquins, sulfureux et même un peu paillards :

« Non passoire chéri, j’ai mal aux trous »

« Le cul d’une vieille pute est à la porté de toutes les bourses »

Voilà, un recueil qui fera passer un bon moment à tous ceux qui ne sont pas coincés et qui comprennent l’humour même quand il est un peu gaillard ou quand il s’en prend aux trop bien pensants qui ne pensent qu’à eux et bien peu aux plus démunis. L’auteur a présente lui-même le menu du jour proposé aux lecteurs :

« Aphorismes, vrai faussaire

à faux adages, vraies maximes

à faux-fuyants, vrais poltrons

apophtegmes, toi-même !

& autres petites pensées éparses »

C’est clair comme le menu d’un restaurant bardé d’étoiles mais c’est beaucoup plus drôle. Alors, on restera sur cette fameuse conclusion assénée par l’auteur :

« Les gros porcs sont tous des gros ongulés. »

Ca c’est bien vrai !

Le livre sur le site de l’éditeur

Le blog de Mickomix 

 

couverture-l-armes-24082016.jpg?fx=r_550_550Jacky LEGGE

(L’)ARMES À FEU ET À SANG

Cactus inébranlable

Si le sous-titre apposé par l’auteur : « Réflexions sans importance, sauf quelques-unes » me semble un acte de modestie très exagéré, je suis par contre beaucoup plus interpellé par le premier mot du titre qui, à mon sens, contient déjà à lui seul l’essentiel du recueil. En effet, le jeu de mot sur « (L’)Armes » dévoile les intentions de l’auteur en suggérant les larmes que l’usage des armes provoque bien trop souvent hélas. Dès le titre Jacky Legge nous laisse entrevoir le message de paix qu’il voudrait adresser à tous ceux qui font usage des armes pour toute sorte de raisons plus mauvaise les unes que les autres.

« Il y a trop d’armes lourdes entre des mains légères, soupira le Parrain »

« En temps de guerre, la Mort coupe les épis de blé vert »

L’éditeur nous raconte que l’auteur est un « explorateur littéraire passionné par les cimetières », il a donc rencontré au cours des ses promenades de nombreuses tombes de jeunes militaires morts pour défendre des causes qu’ils ne comprenaient pas toujours.

« La guerre est le cancer de l’humanité ; il est sans rémission. »

« Les permissions n’ont pas de sens pour les orphelins de guerre »

Sous l’humour et la causticité de ses « réflexions sans importance » se dissimule mal sa compassion pour les innocentes victimes qui n’ont jamais rien demandé.b57515ce-7960-11e3-a7e8-0bcd47b1af90_original.jpg?maxwidth=756&scale=both

« Toute sa vie, la veuve pleura le temps trop bref qui sépara la déclaration d’amour de la déclaration de guerre » (cette réflexion n’est pas qu’une formule littéraire, j’ai connu cette situation dans ma famille).

« La guerre est un cirque où les fauves ont dévoré les clowns. »

« La guerre, c’est toujours le massacre du printemps. »

Ce recueil n’est pas qu’un plaidoyer contre la guerre, c’est aussi un bel exercice littéraire dans lequel Jacky Legge dévoile un réel talent et un esprit très affuté. Certaines de ses réflexions sont, en plus d’être très pertinentes, très drôles.

« L’odeur de compote provoquait des nausées à Guillaume Tell et à son fils »

« L’héroïne est une arme blanche redoutable »

« Seuls les Inuits restèrent indifférents à la Guerre froide »

Je ne saurais clore ce propos sans évoquer les illustrations de Priscilla Beccarri qui agrémentent le recueil, des dessins qui collent bien au texte, des victimes innocentes des armes assassines.

J’ai gardé cette réflexion pour la fin, elle m’a bien fait rire, je la trouve très drôle.

« Un franc-tireur, c’est pas cher.

Un sous-marin, non plus. »

La violence est à la portée de tous !

Le livre sur le site de l’éditeur

 

couverture-les-hamsters....jpg?fx=r_550_550Francesco PITTAU

LES HAMSTERS DE L’AGACEMENT

Cactus inébranlable

Francesco Pittau, c’est un peu « Tête-Dure » le héros éponyme de ce roman que j’ai tellement aimé, un gamin taciturne, rêveur, imaginatif et débrouillard qui est devenu un adulte poète amer et acide qui supporte mal la stupidité, la bêtise et même la connerie de ses congénères. Il a peut-être la tête toujours aussi dure mais ce que ce recueil révèle c’est surtout qu’il a la dent dure envers ses collègues manieurs de plume qu’il maltraite volontiers, dénonçant tous ces « écriveurs » sans talent qui déversent leur mot sur le papier en espérant envahir les rayonnages des librairies.

« Il y a beaucoup trop de poètes géniaux et pas assez de boulangers capables de faire une bonne brioche aux raisins. »

Il n’a aucune pitié pour ces sans talent ambitieux, il les classe avec ceux qu’il affectionne particulièrement : les cons, les cons qui occupent une place de choix dans son recueil.FRANCESCO-PITTAU.jpg

« Il y en a qui ont des têtes de cons, puis il y en a qui ont des têtes d’écrivains… et c’est souvent les mêmes. »

« Les cons disent qu’on est toujours le con de quelqu’un, en espérant ainsi échapper au diagnostic. Bien sûr qu’un moment d’inattention peut toucher n’importe qui, mais y en a pour qui c’est l’abonnement 24 heures sur 24. »

Il a une idée bien précise pour traiter ces dévoreurs de papier :

« Un coup de pied au cul, une baffe dans la tronche, une torsion des oreilles, un arrachement du nez, un genou dans les couilles… et tout ça pour son bien ! »

Si Pittau décoche des flèches empoisonnées à tous les cons qu’ils écrivent ou non, lui, il ne risque pas la vindicte de ses collègues de plume, lui, il écrit des aphorismes comme Verlaine écrivait des vers, c’est un poète, un vrai :

« La nuit collait au visage comme une seconde peau et les étoiles s‘incrustaient au fond des orbites, vives brûlantes, pareilles à des rêves inachevés. »

« Sur son pain de rêve, il déposa une cuillère de confiture de nuit avant de prendre une gorgée de matin de soleil inattendu. »

Il s’inscrit comme beaucoup d’auteurs réunis chez Cactus Inébranlable dans la droite ligne des surréalistes belges. Il manie avec adresse l’absurdité, le burlesque, l’ironie pour énoncer des vérités évidentes, la fatalité fatale, l’ironie désarmante, l’imbécilité imbécile, … :

« Il pissait comme vache qui pleut »

« Quand tu montes une descente et que tu descends une montée, il est bien possible que tu commences à comprendre le sens de l’existence. »

« Il faut bien admettre que la civilisation du Canada Dry et de la Tourtel est en train de remporter la manche. »

« Depuis qu’une loi reconnaît les animaux comme des êtres doués de sensibilité, on les zigouillera dorénavant à coups de boules de coco et on les égorgera à la fraise tagada. »

« Si l’ironie pouvait se contracter comme la grippe, le monde irait mieux. »

Un recueil copieux, désopilant, une leçon de bon sens mais aussi quelques moments de pure poésie qui confirment que « Tête-Dure » n’est pas une réussite isolée, l’auteur a un talent fou. Et pour vous en convaincre, je vous offre quelques vers pour la route.

« Le petit matin

Se pendait au rideau

Avec ses doigts dorés

Avant de pousser ses

Cris de soleil et d’azur

Comme une bouche de bébé. »

Tout savoir sur le livre sur le site de l’éditeur

Le site du Cactus Inébranlable

ÇA PIQUE!

88957_300.jpgpar Denis BILLAMBOZ

Tout le monde le sait depuis toujours, les cactus, ça piquent et c’est sans doute pour cette raison que Jean Philippe Querton a ainsi baptisé, un mot qu’il ne doit pas beaucoup apprécier, sa petite maison d’édition qui publie principalement des livres qui grattouillent, qui chatouillent, qui démangent, qui dérangent, … Pour ma chronique de cette quinzaine, j’ai décidé de rendre hommage à cette petite maison courageuse et engagée qui a fait de la littérature un art de vivre, et de bien vivre, en défendant la liberté sous toutes ses formes, surtout celle de dire ce que l’on pense quand on a envie de le penser. A tout seigneur tout honneur, je vous propose donc un titre du maître des lieux, Jean Philippe Querton lui-même et un autre d’un des flibustiers qui fait partie de sa joyeuse troupe : Georges Elliautou.

 

squelettes-couverture-26082014.jpg?fx=r_550_550SQUELETTES AU HARAS

Jean Philippe QUERTON (1960 – ….)

Je sors encore tout ébouriffé de ce recueil d’aphorismes, avec Querton ça décoiffe, il dit les choses comme elles sont ou comme il les pense sans détours, sans fausse pudeur, sans circonvolutions inutiles et superfétatoires. Il traque l’absurdité, jongle avec les incongruités vocabularistiques et les occurrences littéraires étonnantes ou désopilantes. Anarchiste gourmet, amateur de bon vin comme des belles filles et des bons mots, Il empile les aphorismes, les calembours, les idées saugrenues pour dénoncer la bêtise ambiante, le bon sens oublié, pour le simple plaisir de faire des bons mots, pour narguer le bourgeois bien pensant, pour épater ses amis… J’ai souri, j’ai pouffé, j’ai ri, je me suis délecté, j’ai trouvé ce recueil bien trop petit, je suis arrivé à la fin bien trop vite. J’avais encore envie de déguster, de me régaler, de me marrer…

Mais je me console en me disant que la collection créée par Jean-Philippe Querton, « Les p’tits cactus », dans sa propre maison « Cactus inébranlables éditions » me fournira encore de jolis textes jubilatoires et d’autres bons mots. L’auteur-éditeur a en effet regroupé au sein de sa maison un équipage capable d’affronter n’importe quel temps. « Ce groupe et ce quarteron possèdent un savoir-faire limité et expéditif, mais ils ne voient et ne connaissent la nation et le monde que déformés au travers de leur frénésie. Leur entreprise ne peut conduire qu’à un désastre national… ». Euh, non Mon Général, vous vous trompez de troupe, celle de Querton n’a rien à voir avec ce quarteron de généraux, ce ne sont que des joyeux drilles qui ne pensent qu’à vivre et à bien vivre en faisant rire les autres pour leur rendre la vie plus agréable !2c68a58d-d4f8-4d33-9198-1121774ae027_original.jpg?maxheight=380&maxwidth=568&scale=both&format=jpg

Faites comme moi, en zigzaguant entre les squelettes (les illustrations sont judicieusement choisies), cette cure de bonne humeur, buvez à la source de jouvence – « pour ce que rire est le propre de l’homme » disait le poète – et dégustez les épisodes loufoques du « conte à la con », avant de vous recueillir devant l’épitaphe du maître des lieux :

« Dans le fond de mon verre de Chimay bleue, traîne une certitude : celle qu’un jour, il y en aura une dernière.

Alors, pour éviter de boire l’ultime, je me précipite vers la suivante.

Et ça marche.

La preuve ! »

 

ssds-couverture-18082014.jpg?fx=r_550_550SANS ME SOUCIER DE DESCENDRE DU SINGE

Georges ELLIAUTOU

Ce recueil d’aphorismes est comme ce livre que l’auteur glisse dans son recueil, il « descend de son rayon, s’approche de la fenêtre, ouvre ses pages, respire le grand air de la vie », de la vie avec toutes ses contradictions, ses contraintes, ses aberrations, ses stupidités, ses turpitudes, … tous ses travers que l’auteur dénonce à coups de mots, de bons mots. Les aphorismes d’Elliautou ne sont pas obus qui explosent et détruisent, non, ils sont plus insidieux, plus subtiles, ils piquent, griffent, infectent, polluent, insinuent, dénoncent toute la connerie de notre bonne société, Ils sont comme un bon verre de Bergerac : ils sont chics, leur robe brille et scintille sous le soleil, leur arôme est fin et subtile mais attention ils peuvent empoisonner, ou au moins faire tourner la tête. Et, quand ont les boit, il faut les déguster, ils peuvent séduire, flatter, tout en râpant un peu les joues juste pour se faire mériter. Celui que ne se méfiera pas tombera alors dans leurs rets où il restera prisonnier pendant un certain temps.arton12-123x150.jpg

« La page vierge s’offrit au poète », il la prit pour dénoncer les bondieuseries qui voilent « la femme pour violer sa liberté », les militaires qui « dès la fin de la guerre … préparèrent la suivante », les couples conventionnels qui « se marièrent un jour de suie » et les despotes qui « très sournoisement … rayèrent la liberté des tablettes ». Il abusa aussi de son obligeance servitude pour commettre quelques exploits rhétoriques, quelques calembours sur tout et n’importe quoi, ou presque, et une petite gâterie sous forme de brèves de comptoir.

Et avec lui chantons « jusqu’à plus soif des chansons à boire » !

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ASSORTIMENT DE PALABRES POUR CUL BIEN CROTTÉ

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Lecture de trois parutions du CACTUS INÉBRANLABLE : »GRAND CRU BIEN COTÉ » d’Eric DEJAEGER (poète), « CES PALABRES QUI CACHENT L’APHORISME » de Paul GUIOT (musicien, chanteur, poète) et un collectif : « ASSORTIMENT DE CRUDITÉS » – recueil de nouvelles érotiques de seize auteurs cactus dont Eric Allard, Jean-Philippe Querton, Gauthier Hiernaux, Massimo Bortolini…

 

grand-cru-couverture-1.jpg?fx=r_550_5501. PREMIÈRE APPROCHE. Une question de code.

Ces gens-là ont été élevés au petit lait de Prévert et de ses épigones. Ils jouent du signifiant comme d’autres du violon, sans fausse note, avec un humour rosse, un détournement notoire d’expressions, d’idiomes, de titres, de langues, de proverbes…C’est à celui qui rédigera la meilleure contrepèterie, à celui qui fera des tours dans sa langue comme on chiffonne du papier,…

Dans le genre, je te la joue signifiant zéro (cf. Barthes, le degré zéro de l’écriture), les codes ici mis à l’œuvre rejoignent sans cesse les verheggenades exposées en pleine lumière, après « Paroles » de Prévert (« cet enfant fou qui feint de faire du feu près de feu son père »), après le non sense total de notre Devos national, enfin transfrontalier, après les « viens ici mon gégé » de Coppens (Bruno, pas celui de la Lucy), après toutes les blagues à deux balles (pour messieurs dames…)

La trouvaille de Dejaeger est de se mesurer sans cesse avec les exploits préalables d’autres fauteurs de codes…Avant de se lancer, il vérifie si le signifiant n’est déjà pas entaché de web ou autre. A ce compte-là, il peut édifier de l’inédit, et en matière d’outrances cocasses, coquines, zébrées ou pas, il en connaît un chien! Seul ou en instance bipolaire (avec le Stas, autre jongleur impénitent des mêmes éditions), il récrit les bestiaires, les listes, les almanachs. Du genre : animaux-valises, propres dégénérescences ou créations composites straordinaires comme eût dit Zazie (pas celle qui chante, mais celle qui débite à tout bout de champ des grossièretés parisiennes!) : « animaux-valises cigognes » : lajumengoustermite ou le lézaragondin….

Expressions idiomatiques renouvelées :

« Deux secouristes ne s’embrassent pas : ils se font la bouche à bouche« 

Proverbe remanié :

« Faute de vin de grive, on boit du vin de merle »

Aphorismes affreux et sales :

« Se taire rend muet

et se terrer rend rat.« 

 

ces-palabres-qui-cachent-l-aphorisme-cover-1-.jpg?fx=r_550_5502. PAROLES… PAROLES…

Palabres, tout de suite, ça vous scie quelqu’un! ça vous le met en position littéraire! Palabrons, mon cher! Oh! que votre palabre est heureuse! Piochons à l’aise dans ces paroles d’un poète qui aime lui aussi prélever aux formules classiques, à la langue de Voltaire (« qui, bien sûr, (c’est moi qui ajoute), a le « sourcil » de la langue »), à la littérature appellation contrôlée (style Rilke et ses conseils à un jeune poète : ça devient : « Commence par acheter un carnet inspirale » ou « Marche toujours les pieds calés au fond de tes poches« ).

La récriture « Qui ne dit mot se concentre », les calembours (monsieur madame) : « Tout terrien qui finit rien« , hautement métaphysique!

Et tout est à l’avenant d’une imagination que Guiot maîtrise jusqu’à l’usure ou l’os comme on voudra : « Quand Le Pen négocie, Marine marchande« .

Le précis d’écriture, manifeste cocasse et tellement vrai pour certain(e)s :

« Ecrire pour faire impression. / Ecrire donne des chevaux blancs .(n’est-ce pas Jérôme Garcin?)/ Ecrire léguer son corps au silence.

Des dialogues absurdes, aux belles chutes de mots :

Paul Guiot, vous venez de créer le label « Les Produits du Tiroir ».

– En effet…

– Mais, au fond, dites-nous, les Produits du Tiroir, qu’est-ce?

On pourrait citer toutes les pages, comme pour les listes effarantes de Dejaeger.

Une dernière : « Les femmes commanches/ sont peu actives sur Facebook,/ en cause, leur statut squaw » Un jour de week-end de la femme, cette phrase porte loin son message.

 

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3. DES NOUVELLES ÉROTIQUES et des illustrations osées d’un temps ancien (vieilles photos et autres dessins cochons)

Pas piquées des vers, pour pasticher un titre récent, ces nouvelles, qui égratignent les pudibonds de toutes sortes, tous ceusses qui , à croire, n’ont jamais entendu parler de gland « violacé », ni frémi, ni à l’énoncé d’un rendez-vous épicé sous les draps, ni franchi le cap rose de tous les sé-vices! Bref, il y a là matière à délices, entre le croquignolet, le suave, le délicat, les parties de jambes parfois saignées, les menuets au lit, les surprises du chef, les métaphores du membre, hautes en couleurs et les auteurs féminins ne sont pas les plus coincées, queue du contraire! Bref, ça swingue, ça déménage les petites « culottes », ça fait fort côté notices biobibliographiques des énergumènes qui se sont livrés au jeu : ex Eric Dejaeger (1958-20**) a les cheveux plus longs que le membre viril ex Né en 1961, Massimo Bortolini…Tour à tour et tout à la fois cunnilinguiste, maître queux, couille molle… ex Isabelle Buisson aime écrire dans le domaine du désir… ex Jean-Philippe Querton est resté puceau en littérature jusqu’à l’âge de quarante-quatre ans…

Les auteurs s’en sont donnés à corps, cœur, cri jouijoie…et Th.Roquet a troqué facilement ses enthousiasmes, forcément « meilleur qu’un Turc » quand il s’expose, pour des pages affriolantes… Citons Eric Allard, André Clette, Cathy Garcia, Sylvie Godefroid, Gauthier Hiernaux, Ziska Larouge, Hélène Dassavray, Guillaume Siaudeau, André Stas et Michel Thauvoye. Seize invites à ne pas quitter les couettes pour réveiller « ma déesse blonde », pour connaître « ivres de langueur » des moments de « jouissance en canon », « un chant qui rebondit sur les murs de la pièce »… La photo de couverture est bien chaste, vraiment dans l’esprit surréaliste comme chez Bunuel : le spectateur ne verra jamais la beauté dénudée de « Tristana »/Deneuve, puisqu’elle ouvre son peignoir, le dos au public! Les photos et illustrations intérieures, ben mon cochon, font la nique aux curés, aux bonnes sœurs et à la morale bien pensante (surtout ne jouis pas, fais-toi mal, souffre en silence)…

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Sur la photo, de gauche à droite, Paul Guiot, Jean-Philippe Querton, Éric Dejaeger et André Stas.

Le site des Cactus Inébranlable Editions

Un recueil de NOUVELLES ÉROTIQUES pour NOËL

par Éric Allard – Massimo Bortolini – Styvie Bourgeois – Isabelle Buisson – André Clette – Hélène Dassavray – Éric Dejaeger – Cathy Garcia – Sylvie Godefroid – Gauthier Hiernaux – Ziska Larouge – Jean-Philippe Querton –  Thierry Roquet – Guillaume Siaudeau – André Stas – Michel Thauvoye

Tout savoir sur l’ASSORTIMENT DE CRUDITÉS, le recueil paru chez CACTUS INÉBRANLABLE éditions et les 16 auteurs (présentation + photo + extrait de leur nouvelle) qui y ont contribué:

http://cactusinebranlableeditions.e-monsite.com/pages/cat… 

ou ici, vers la page Facebook consacrée au livre:

https://www.facebook.com/pages/Assortiment-de-crudit%C3%A9s/675706475802843

Ma nouvelle est intitulée Un vieux maître SM. C’est l’histoire d’un maître SM qui reçoit sa dernière soumise et révèle par ailleurs la possible origine de sa pratique. Un texte qui doit beaucoup à ma lecture de Tanizaki, Bataille ou Lamarche et à un film de Ferreri (pour un clin d’oeil): « La dernière femme« 

Il sera disponible dès lundi dans toutes les bonnes librairies au prix modique de 17 €

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Un privé à bas bilan / Éric Dejaeger + Promo d’été chez CIé

Le dernier né d’Éric Dejaeger conte l’histoire d’un privé qui débute dans le métier. Très vite, il a deux enquêtes à mener dans des milieux pour le moins louches. Avec un handicap de taille: un priapisme chronique. Conclura-t-il ses diverses investigations? Un polar palpitant & tordant. Brautigan est en train de le lire, apprend-on de source bien informée, et il se régale.

Ma lecture du roman: Un Loup dans la bergerie =)

http://lesbellesphrases.skynetblogs.be/archive/2013/06/06/un-prive-a-bas-bilan-eric-dejaeger-cactus-inebranlable-editi.html

Le blog d’Éric (je vous recommande sa série des Street, une ville en état de poésie) =)

http://courttoujours.hautetfort.com/

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La promo d’été (jusqu’au 15 juillet) de Cactus Inébranlable éditions: 3 polars pour 28 € (au lieu de 45 €). Des polars différents, humoristiques & humains, déjantés & tendres, noir & or… signés Dejaeger, Querton, Ellyton, Hiernaux, Thauvoye, Bailly. 

http://cactusinebranlableeditions.e-monsite.com/

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Dis, petite salope, raconte-moi tout… / Olivier BAILLY

Enfer & Paradis

Ce roman est-il un drame de la jalousie quand elle devient obsessionnelle, rapport d’un dérèglement mental ou métaphore d’un monde où la femme érigée en statue de fiel, en mangeuse d’hommes, met le mâle à ses pieds, en position de n’être jamais rassasié par elle ? Même et forcément si le mâle est gros, affecté d’un féroce appétit de vivre, d’en découdre avec l’existence, avec tout ce qu’elle offre – notamment en termes de rêves via la publicité et ses modes de consommation. Inévitablement on pense au Swann de Proust, à L’Enfer de Chabrol d’après un scénario de Henri-Georges Clouzot. Mais sur fond d’un monde déboussolé, abreuvé d’idées toutes faites.

Ce gros-là, jamais nommé, ne fait pas régime, il ingère tout, plus dans la vitesse que dans la profusion. S’il s’est piqué dès l’adolescence d’une femme enfant (le prénom à lui seul, Vanessa, est tout un programme lolitesque, avec références à Gainsbourg – dans le titre et l’épigraphe – et Paradis), elle va ensuite mordre à l’hameçon, au-delà de ses espérances, donner tout d’elle, jusqu’à un enfant, mais ce ne sera pas assez, il ne voudra jamais le croire, croire en son étoile, car il est programmé pour le malheur (le bonheur est trop commun, trop partagé), d’où sa dépendance à elle comme objet transitionnel (le livre montre que la relation à ses parents n’a pas été satisfaisante), voué à disparaître. Et cette addiction est au-delà du sexuel, du textuel, et bien loin de l’amour, du moins tel qu’on nous le rabâche, idéal et altruiste, tourné vers l’autre, le bien être de l’autre…  

Sur le chemin impossible entre lui et Vanessa, il y aura une fillette qui ne pourra jamais combler l’espace pris par sa mère dans le mental de son père et qui devra dégager. Pour qu’il aille au bout de son délire, de sa propre histoire. D’où l’idée qui ressort qu’on se choisirait très tôt un scénario de vie à tourner, à dérouler et que le fou serait le réalisateur tyrannique qu’aucun aléa de tournage ne ferait dévier de son projet.

Ce qu’il sait faire de mieux, notre homme c’est vendre, des histoires pour « refiler une quelconque camelote », que ce soit par téléphone ou de vive voix, se servant de tous les éléments susceptibles de favoriser l’opération, et sans état d’âme.

Dis, petite salope…, c’est une image fixe de femme prise à l’adolescence, innocente et salope en puissance, qui phagocyte toutes les histoires, les fait proliférer tel un cancer dans un organisme qui n’a plus d’autre raison d’être. Vanessa, elle, est privée de parole, tout ce qu’elle dit est tourné en mensonge, nié dans sa vérité par le film que se fait son mari.

C’est aussi, on l’aura compris, une métaphore du romancier. Qui, sur l’objet sacré de la littérature, produit des histoires sans fin. Qui ne valent que pour son amour des mots et qui ne demandent qu’à être jugées sur leur style, sur leur façon de raconter. Si le lecteur adhère, c’est vendu-gagné.

Tout alimente la parano du gars, et cela donne lieu à des scènes tragicomiques autant qu’épouvantables, auquel s’adresse un narrateur froid, distancié qui débiterait un acte d’accusation. Le lecteur, pris à parti au même titre est happé dans la chute de l’asocial. Les faits sont relatés sans répit, tout nous est donné à lire : les produits et les marques, les opinions comme les actions des personnages, tout va vite chez cet homme pressé d’en finir. Quand tout a été dit-perdu, quand on est à la rue avec l’inconscient, sans toit, sans toi, sans tu à qui s’adresser, on peut à nouveau parier sur un chiffre, une idée fixe. Tant qu’il y a de la vie, du verbe, de la folie.

 « Qu´on soit béni ou qu´on soit maudit, on ira

Toutes les bonnes sœurs et tous les voleurs
Toutes les brebis et tous les bandits
On ira tous au paradis, même moi »

Éric Allard

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