TOUT AMOUR EST ÉPISTOLAIRE de BARBARA AUZOU (Z4 Editions) / Une lecture de NICOLE HARDOUIN

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De ce qui brûle, je suis le feu.

                                             Pierre Emmanuel, in Sophia

Philtre enroulé dans les mots bleus puisés à l’encre de tes yeux, ailes d’oiseaux sur des gouffres où bruine l’attente dans le gémir du vent.

Sortilège pour un amour sans visage, rêve ou réalité dans les ors d’un froissis de nuages, mirage derrière une source qui pulse et envoie des petits papiers en plein ciel, énigme que la poétesse cultive à merveille dans des lettres où l’attente déchire ses ronces, mots légers comme les rêves d’une salamandre, mots où le désir courbe les passiflores lorsque, l’hiver elles cherchent une onde de chaleur égarée dans un amour qui se love au creux de ce recueil.

C’est une valse à l’endroit, à l’envers entre pulpe du vent et cristaux de nuit  pour se retrouver et s’étourdir avec un oiseau matinal venu de nulle part et qui s’envole vers un point-visage que lui seul connaît, un point sans virgule pour un amour qui naît, renaît sans fin , un amour enclos dans les fleurs, les ailes, les prés et jardins, un amour qui se promène dans des chemins qui toujours ont tendance à se courber pour revenir, plus proche, plus loin, plus précis, plus nourrissant : j’ai faim, j’en appelle à tes mains pour remonter jusqu’au pain.

Amour écartelé, amour nourricier face à un oiseau sur notre arbre artériel.

Entre coquelicots, ancolies pulse le goût d’aimer et j’ai trempé mes mains dans un peu de poésie avant qu’elles ne s’envolent avec ses oiseaux de rosée. Chez la poétesse l’amour brille toujours dans tous les joyaux de la nature, s’enroule dans les plumes des oiseaux, elle accorde sa voix à leur chant et se risque même, lorsque les becs de pluie tapent dans les hautes bottes de l’aube, à demander candidement à l’absent-présent, à cet amour sans visage mais si présent, elle demande as-tu reçu les oiseaux que je t’ai envoyés ?

Superbe univers épistolaire à la jouissance rebelle qui rend doublement présente une ardente absence, qui de lettes en lettres, de jours en jours se nourrit de vent, de mots étoilés sur des pages de ténèbres, de fleurs, d’oiseaux car je viens à toi comme on navigue à l’oblique sur les ailes d’oiseaux réciproques.

Les nuits s’éclairent au vertige des mots, à la magie de la poésie portée haute par Auzou qui au sein de tout ce gris le cœur de la tempe au poignet a trouvé un nuage où se balancer… il me semble que c’est un défi à mon attente si facilement indocile… Et je pourrais te parler tout autant la langue des oiseaux pour caresser doucement la magie des mots… que je n’aurais dit assez combien je t’aime.

Barbara Auzou offre, dans ces textes suaves, un amour brûlant et dans un geste d’érotisme joyeux… elle remplit son panier d’irréductibles printemps que l’on partage allégrement car c’est un voyage qui ne peut laisser indifférent.

Elle est l’orante d’une ample liturgie odorante, charnue, colorée. Avec des violences de savane, elle brûle ses chemins secrets parmi étoiles et songes, c’est pourquoi au détour d’un sentier j’ai entendu le fruit mûr de ton rire élever le printemps au niveau de l’été. Pour le lecteur ce recueil est un perpétuel été où il est admirablement démontré que tout amour est épistolaire.

Nicole Hardouin

Le livre sur le site de l’éditeur

Lire, dit-elle, le blog de Barbara AUZOU

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