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Le montreur de marches signale les escaliers à ceux qui les préfèrent aux ascenseurs, aux montgolfières, aux échelles de corde.
Tous les escaliers ne sont pas recouverts d’un tapis rouge, ou vert ou fermé, et l’utilisateur risque de passer à côté, au-dessous ou au-dessus, sans les calculer.
D’autres, plus distraits, l’empruntent sans le rendre ; ils s’exposent alors à de sévères réprimandes du propriétaire.
On a connu des propriétaires délaissés de leur cage d’escalier à la veille d’une fête des voisins, d’un enterrement de vie de garçon(n)e, d’un raout, courir les brocantes de la région pour en trouver un à bas prix, tout déglingué et sans main courante, ne respectant plus les élémentaires mesures de sécurité.
De plus, certains escaliers sont escamotables, emboîtés les uns dans les autres comme des poupées russes et invisibles à l’œil nu – ou à peine couvert d’une paupière de misère.
D’autres, l’hélicoïdal carré, le 2/4 tournant, le débillardé ou le crémaillère, ont des formes si tarabiscotées qu’on les prend volontiers pour une récréation d’art contemporain échouée sous la trémie. Sans compter les marches rayonnantes, balancées ou participant d’un escalier à pas alternés, non inclusives donc, qui déterminent une latéralisation du pied pour chaque marche. Impossible dès lors de commencer à dévaler de la jambe gauche la volée si on s’est levé du mauvais pied !
Ces quelques méfaits démontrent à loisir l’importance du montreur de marches dans la vie de toutes les habitations ou lieux de vie nécessitant de passer d’un niveau à un autre si on n’est pas muni d’un deltaplane personnel ou d’un harnais en lien serré avec un fil hypertendu.
On peut dire que le montreur de marches est un liftier d’escalier, le groom de la porte de service qui pourra, s’il y a lieu, aider la personne invalide, ivre d’inculture, fatiguée de la politique régionale ou nécessitant un soutien manuel, à gravir la flopée de marches ou à la descendre d’un même pas balancé.
Durant la formation, donnée par des cascadeurs à la retraite, des organisateurs d’événements ascensionnels et des compteurs de degrés à l’angle de vue pointu, le candidat apprendra à gérer la nuée de photographes postés sur les gradins.
Le montreur de marches officiera aussi dans les festivals d’escaliers et de chausse-trappes où se pressent collectionneurs et amateurs. Il scrutera les éventuels fauteurs de trouble qui, durant la cérémonie de montée des marches, risquent de dévoiler une plage de chair incongrue ou faire valoir un slogan pourri imprimé à même la peau, du genre : « À bas les feux de la rampe ! », « Arrêtons les mains courantes ! », « Augmentons le giron, consolidons le limon ! », « Plus de moyens pour les gras bas-de-terre dans les monte-escaliers ! » – qui heurtent les intellectuels bas-de-plafond et les travailleurs de la plume payés une bouchée de peintre en droits d’hauteur.
Dans la région de l’Entre Sambre-et-Meuse qui fourmille de marches à tous les paliers de décomplexion, à tel point qu’on ne les distingue plus les unes des autres, le montreur de marches indiquera le festival folklorique approprié, celui où a lieu tel défilé de groupes de marcheurs costumés en tout et n’importe quoi de plus ou moins historique lié à l’empereur Napoléon. Une telle dévotion à la période du Premier Empire ne se trouve que dans cette région du monde, limitrophe à la France et par ailleurs riche en écrivain(e)s aussi typiques.
On y voit sévir un esprit militaire, une discipline, un goût rare pour la détonation doublé par un esprit d’entraide se manifestant par le partage de bières locales et d’épisodes de jeunesse peu ragoûtants, jusqu’à ne plus reconnaître un gladiateur de la légion Wagner d’un combattant ukrainien jaune et bleu ciel qui inspirent de nombreux candidats à la Défense de la Région à la veille de briguer un mandat ministériel.
Précisions pour être complet que le montreur de contremarches est une spécialisation du métier de montreur de marches qui s’apprend sur le tas à force d’avoir le nez sur les échiffre, talon, collet de la marche standard.
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