Un journalisme mis au pas

La carte blanche rédigée par l’Association des Journalistes Professionnels et des professeurs d’université à propos du conflit au « Vif » et refusée par Le Soir et la Libre Belgique…

Un journalisme mis au pas

Le brutal licenciement signifié sans motif, le jeudi 22 janvier, à quatre journalistes chevronnées de l’hebdomadaire Le Vif /L’Express n’est pas qu’une péripétie douloureuse au sein d’une grande entreprise, comme il s’en déroule hélas chaque jour dans le pays. La mise à l’écart de collaboratrices qui comptent jusqu’à vingt ans d’ancienneté au sein du magazine, et qui en ont forgé les valeurs autant que la réputation, relève en l’occurrence d’une épuration dont les intentions manifestes sont inquiétantes pour la liberté rédactionnelle du Vif en particulier et pour le journalisme en général.
Le directeur du Vif/L’Express, qui s’était déjà signalé antérieurement à Trends/Tendances par une propension à distribuer des C4, et qui en est, au Vif, à 6 licenciements, 2 départs et 2 déplacements imposés, l’a précisé lui-même : aucune raison économique ne l’a poussé à congédier la rédactrice en chef et 3 rédactrices spécialisées l’une en politique intérieure, l’autre en sciences, la troisième en culture. Invoquant des relations dégradées entre l’équipe de rédaction et la rédactrice en chef, la direction – qui n’a pas réussi à résoudre ces problèmes – a choisi la manière la plus radicale d’y mettre fin. Le prétexte est non seulement léger mais, en outre, il ne concerne pas toutes les journalistes concernées. La valse des licenciements, entamée au Vif voici bientôt trois ans, traduit en réalité une obsession constante : mettre au pas la rédaction du premier magazine d’information générale de la Communauté française, qui avait précisément fondé sa crédibilité sur une totale indépendance d’analyse et de jugement, tant à l’ égard de ses propres actionnaires – le groupe flamand Roularta- que vis-à-vis des différents pouvoirs, politiques comme économiques, de la société belge.
Durant plus de deux décennies, Le Vif/L’Express a pu défendre un journalisme exigeant, soucieux d’abord de la pertinence et de l’utilité, pour ses lecteurs, des sujets qu’il abordait. Au nom de cette éthique, il pouvait parfois estimer nécessaire de fâcher un annonceur, de heurter un ministre ou de consacrer une couverture à un thème moins vendeur. Tout cela n’est plus allé de soi dès l’instant où, inquiétée par une légère érosion des ventes, la haute direction de Roularta s’est laissée convaincre qu’il fallait remplacer les journalistes expérimentés, couper les têtes qui dépassent, et faire de la docilité aux impératifs économiques de l’entreprise un credo admissible.
L’éditeur du Vif n’est pas le seul à déposséder ainsi la rédaction de sa capacité à penser ses priorités et à définir ses champs d’action. En Belgique comme à l’étranger, trop d’entrepreneurs de presse choisissent, parfois sous le prétexte des difficultés économiques, d’appauvrir les contenus, de réduire les effectifs, de se priver de plumes critiques et d’esprits libres, de mettre au placard des talents fougueux, et de préférer des chefs et sous-chefs soumis. Le Vif n’est pas le seul, mais il est l’unique hebdomadaire d’information générale largement diffusé en Communauté française. Ceux qui l’épuisent aujourd’hui de l’intérieur portent à cet égard une responsabilité devant l’ensemble de l’opinion.
A l’inquiétude pour l’avenir de ses journalistes chassés, mais aussi de ceux qui restent, s’ajoute la stupéfaction face à la brutalité sociale : convoquées un soir par un SMS sur leur portable, les quatre licenciées ont été renvoyées sur le champ de grand matin, avec interdiction formelle de repasser par la rédaction pour emporter des effets personnels. Deux heures sous surveillance leur ont été concédées, le samedi suivant, pour cette besogne. De quelle faute gravissime, de quel délit, ces quatre là étaient-elles donc coupables pour mériter un tel mépris ? Rien ne justifie une telle violence dans les relations sociales, qui en l’occurrence se double d’un réel mépris pour le droit du travail et contraste avec l’image de la paisible entreprise familiale qu’aime à se donner Roularta. La réaction de la Société des Journalistes du Vif – qui observait dès jeudi un arrêt de travail – comme le soutien inconditionnel de l’Association des Journalistes Professionnels et des syndicats, indiquent que la limite de l’acceptable a été franchie.
La crise financière, la chute des revenus publicitaires, la diversification technologique des médias et les investissements qu’elle réclame ne pourront jamais justifier à nos yeux que le journalisme soit réduit à sa seule valeur économique, que les journalistes ne soient plus les chiens de garde de la démocratie mais seulement des petits soldats zélés chargés de vendre des contenus formatés pour les impératifs commerciaux à court terme. Nous avons besoin de rédactions expérimentées, en effectif suffisant, libres et indépendantes. Comme nous avons davantage besoin de matière grise, d’expertise, de culture et de réflexion journalistique étayée que de mise en scène spectaculaire de papiers vulgarisés à l’extrême pour plaire au plus grand nombre. Les comportements de certains managers et les plans d’économie concoctés au nord comme au sud du pays ne vont pas dans ce sens. Maintenons à nos médias leurs capacités intellectuelles : respectons les journalistes !

– Martine Simonis, Secrétaire Nationale de l’Association des Journalistes Professionnels
– Pascal Durand, Professeur ordinaire à l’ULg
– Benoit Grevisse, directeur de l’école de journalisme de Louvain (UCL)
– François Heinderyckx, Professeur ordinaire à l’ULB
– Claude Javeau, Professeur émérite de l’ULB
– Jean-Jacques Jespers, directeur de l’école universitaire de journalisme de Bruxelles (ULB)
– Hugues le Paige, journaliste
– Gabriel Ringlet, Professeur émérite de l’UCL
– Marc Sinnaeve, Président du Département journalisme de l’IHECS


Poulet de canon

 

Le poulet de canon atterrit immédiatement dans votre assiette, si vous mangez en terrasse bien sûr. Envoyé depuis le centre d’élevage par des artificiers spécialisés dans le plumage d’oiseaux et grâce aux progrès cumulés de la balistique assistée par ordinateur et de la restauration rapide, ledit volatile vient se placer entre couteau et fourchette, cuit à point, assaisonné: vous n’avez plus qu’à en faire une bouchée. Un léger arrière goût de poudre subsiste qui ne déplaît généralement pas aux amateurs de viande grillée.

Mes sirènes

Chaque vendredi soir, je pêche des sirènes dans l’eau des miroirs. Sur un fil de laine, je les fais sécher. Le samedi midi, elles me préparent des crustacés à la sauce corail. Après le repas, je triture leurs écailles pour un filet de chair. Puis je bois des baisers à leur bouche encore salée. On dort dans des lits grands comme des rivières. Puis on part rêver.

Le dimanche matin, je les emmène au marché. On achète des poissons de toutes les couleurs: daurades roses, raies noires, silures blancs, soles saumon, limandes vert d’eau… À la fin du week-end, j’installe les sirènes derrière les glaces sans tain d’où elles m’adressent longtemps de grands signes muets. Pendant la semaine, je vais à la chasse aux reflets.


 

Fils (fille) d’homme (de femme) politique

Pour qui ne sait rien ou quoi faire dans la vie, et au lieu de choisir la carrière pénible d’avocat d’assises, d’assistant universitaire, de chômeur en fin de droit, de psychologue d’entreprise, d’enseignant du plein exercice ou d’ouvrier du bâtiment, l’enfant d’homme (au sens large) politique a son destin tout tracé devant lui. La vie politique, telle que relayée par les médias, nous donne de nombreux exemples accablants de ce dont ils sont capables. Les plus habiles arrivent vite à nous faire oublier leur parent mais c’est un effet de brouillage familial consubstantiel à ce cas de figure. Certains, par crainte du ridicule (on les comprend !), hésitent encore à franchir le pas. Rappelons-leur que, partout ailleurs, les examens et autres rites de passage seront de rigueur et qu’il n’y aura pas d’électeurs gogos prêts à voter, les yeux fermés, pour un nom, une allégeance au titre familial.

Le fils ou la fille d’homme politique doit faire fi de ses scrupules, il doit aller de l’avant, sans oublier l’auteur de ce bon conseil (qui, comme tout le monde, rame dans la vie de tous les jours) quand il aura remplacé son papa ou sa maman chérie en haut de l’affiche électorale.

 

Épisode 8: Concours de blogues

Résumé des épisodes précédents:Le narrateur rencontre sa demi-sœur, ce qui le distrait un moment de ses réflexions douces-amères sur l’avenir des blogues.

 Sur l’avis d’un ami blogueur, j’ai participé à des concours. Pour commencer, celui de la création du plus grand nombre de blogues en 50 minutes chrono. Je suis arrivé 3ème, j’en avais créé 187 mais j’étais bien en deçà du vainqueur qui en avait lancé 523. Je soupçonne, et je ne suis pas le seul, qu’il en avait caché sous la chemise. On a posé réclamation mais, même s’il avait été déclassé, 35 petits blogues me séparaient du deuxième, un Estonien sans travail, que je retrouvai bientôt sur un autre concours, celui consistant à obtenir, en 24 heures chrono, le plus de visiteurs sur un blogue de son choix. Le tout étant, en la circonstance, comme tout bon blogueur le sait, de choisir des mots-clés judicieux, de taguer juste. Mon expérience me servit et je tapai : « Britney nue », « Paris Hilton nue » (Ségolène n’avait pas encore posé sa candidature à la candidature et personne ne connaissait l’existence de Sarah Palin). Il faut aussi choisir des vieilles gloires pour les séniors : Brigitte Bardot par exemple, en espérant qu’il n’existe aucune photo d’elle dénudée aujourd’hui et même vieille d’une décennie. Il faut penser à ceux ou celles qui veulent voir des hommes nus, politiques de préférence, car c’est moins leur dada, excepté le calendrier parlementaire. Reynders, Gavaux, Lutgen pour les Belges, sans oublier l’incontournable Daerden (avant son lifting), éviter les hommes politiques carolos, trop changeants, dont on n’a pas le temps de retenir le nom ; chez les Français :Copé, Sarko, de Villepin…  Darcos ? Non, pas lui quand même ! Et choisir ses mots-clés en fonction de l’actualité people, des jeux de téléréalité etc.

Finalement, j’ai perdu à un visiteur près. Je l’aurais bien étranglé, celui-là qui a cliqué sur le blogue de mon concurrent l’ayant emporté avec une phrase-clé inattendue: « Gable à cheval sur Mansfield ». Il paraît que c’est fort couru des blogueuses âgées (plus nombreuses, comme les statistiques le montrent, que les blogueurs) qui se mettent à l’usage des TIC dans les centres cyber des maisons de repos.

Non seulement je n’avais pas fait d’études mais j’étais incapable de gagner le moindre concours malgré la passion de toute une vie pour la blogue attitude. Si j’avais souvent été mal dans ma vie, à ce moment-là, ce fut le pompon: je me jetai sous un train, enfin, j’attendis couché sur les rails un train qui n’arriva jamais. Manque de pot, l’Estonien avait eu la même idée que moi cinq kilomètres plus avant. Lui, il avait tapé: « Le baiser de Clark Gable et Vivien Leigh dans Autant en emporte le vent » Pour les mots-clés, il faut éviter les longueurs, ça lui avait échappé. Lui, le train-train de la vie l’a raccourci dans les grandes largeurs.

 

chez le dentiste

 

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chez le dentiste

poussa de tels hurlements

que les exégètes

venus soigner

des caries verbales

les attribuèrent

tantôt à de l’Artaud

tantôt à du Tzara 

 

par contre

pour le zzzzzzzzzzzzzzzzz

de la fraise

tous convinrent qu’il était

d’Isidore Isou

le momoqueur

Le 13 janvier dernier, le momoqueur a soufflé sa première bougie.

Un an de momoqueurs, c’est 228 envois, 220 abonnés, quelque 450 phrases, 45.400 courriels…

Un plaisir de lecture matinal, dans lequel Jean-Philippe Querton (cliquer ci-dessous sur la page que lui consacre sa maison d’édition pour le connaître mieux) nous propose quelques aphorismes, forcément moqueurs, de son cru ou non.

Voici quelques exemples tirés des derniers envois.

 « Juger les gens uniquement d’après leur petite taille me semble réducteur… »  (Jean-Loup Nollomont)

« Mon banquier me racontait des histoires.
Mais j’ai tout découvert dans mes extraits de contes. »
(Marco)

« Rendre l’âme ? D’accord, mais à qui ? » (Serge Gainsbourg)

« Partir, c’est mourir un peu, mais rester, c’est crever doucement. » (Gilles Veber)

Et voici quelques aphorismes de Jean-Philippe Querton himself, tirés, eux, des premiers envois (histoire de vous mettre l’eau à la bouche) :

« J’ai rencontré un marabout diabétique, il ne peut prévoir le futur que dans le marc de café sucré. »

« Si la connerie était une maladie mortelle, on passerait sa vie aux enterrements »

 « Un gréviste de la fin, c’est quelqu’un qui refuse de mourir. »

 « Commettre un délit de cuite est parfois salutaire »

 « Si tous les manchots du monde voulaient bien se donner la main, on s’occuperait un peu plus de leurs moignons. »

 « Le petit déjeuner de l’astrophysicien : un croissant de lune, un pain au chocolat de Vénus et un bol de céréales de Mercure. »

http://chloedeslysblog.canalblog.com/archives/2007/12/20/7297483.html

 

Pour ceux qui souhaiteraient recevoir la livraison journalière, ou pour  les gourmands qui voudraient se (re)faire l’intégrale des envois de la première année, une brochure électronique, « Une année de momoqueurs », est à votre disposition à l’adresse email suivante : jeanphilippe_querton@yahoo.fr

 

le poème du dimanche

le poème à eau

résiste mieux au sel


le poème à clous

retient la parole blanche

 

le poème à roulettes

augmente la vitesse des mots

 

le poème du dimanche

passe à travers les fêtes

 

le poème du lundi

peut grever la semaine

 

le poème de l’après-dîner

se digère dans la nuit

 

le poème poids léger

s’envole dans le verbe

 

le poème murmuré

se porte à l’oreille

 

le poème en lecture rapide

avale les sons lents

 

le poème à poils ras

se prête aux caresses phoniques

 

le poème à bras longs

emporte tous les concours

 

le poème bivalve

s’ouvre avec un couteau à musique

 

le poème du dimanche

le poème du lundi

et celui des autres jours aussi