LES ATRIDES au THÉÂTRE ROYAL DU PARC de BRUXELLES / Un article de Jean-Pierre LEGRAND

JEANNE D'ARC AU BÛCHER d'HONEGGER au THÉÂTRE DE LA MONNAIE, vu par Jean-Pierre LEGRAND
Jean-Pierre LEGRAND

Jeudi dernier, c’était la première de la pièce « Les Atrides » au théâtre du Parc à Bruxelles. Mise en scène par le très talentueux Georges Lini, la tragédie est une libre adaptation de la malédiction des Atrides telle qu’elle nous est parvenue via Eschyle, Euripide, Sénèque et Sophocle.

La pièce se joue jusqu’au 15 février.

La mise en scène est résolument moderne : ponctué ou accompagné d’illustrations musicales fort réussies (bravo aux musiciens également excellents acteurs), le texte, souvent brillant, est sublimé par un décor dépouillé mais très évocateur. Le fond de scène est occupé par une grande toile sur laquelle sont projetés des motifs nuageux et tourmentés irisés d’une lumière changeante selon le déroulé de la tragédie. De part et d’autre de la scène, sont disposés des gradins où se tiennent des spectateurs : ils symbolisent le chœur traditionnel de la tragédie ; les musiciens sont leur coryphée .

Sous la réserve d’une Wendy Piette à mes yeux un peu faible dans le rôle d’Iphigénie (elle se rachète dans celui de Chrysothémis qu’elle joue aussi), la distribution est excellente : on retrouve Itsik Elbaz dans le rôle d’Agamemnon et Daphné d’Heur dans celui de Clytemnestre tous deux à leur meilleur niveau et fort bien entourés. Dans la petite plaquette de présentation, le metteur en scène nous annonce : « Ici, point de bruit et de fureur ». C’est un peu vite dit : l’hystérisation voulue dans le jeu des acteurs, soulignée encore par la sonorisation (un peu défaillante au début du spectacle) dément largement ce propos… C’est tant mieux : cette tension qui, par moment paroxystique, éclate en monologues véhéments, m’a fait songer à l’Elektra de Strauss : il y a quelque chose de cette musique sauvage dans ce spectacle aux résonances opératiques qui m’a profondément séduit. Par moment on reste scotché par l’expression froide du pouvoir à laquelle répond la pulsion brutale du désir de  vengeance qui, par deux fois, sombre dans l’assouvissement presque orgasmique du crime.

Régénérées au prisme de notre modernité par le metteur en scène, ces Atrides posent de multiples questions : comment échapper à l’emprise capiteuse de la vengeance et à l’engrenage du crime ? Quel est le fond de notre humanité ? Le ressort de la vengeance est bien suggéré. Clytemnestre et Electre sont emmurées dans leur douleur, « leur âme voudrait se pendre et tous les membres de leur corps aspire à la mort » ; la poursuite hallucinée de la vengeance est leur dernière raison de vivre, de survivre.

La pièce se termine sur cette interrogation d’un des musiciens-coryphée : « Mais nous, nous tous, sommes-nous meilleurs par hasard ? »  La question est ouverte. J’ajoute : sommes-nous fondamentalement meilleurs ? N’y a-t-il pas en chacun de nous et qui agite l’humanité entière, un Agamemnon qui, inlassablement sacrifie ce qu’il a de plus cher ou de plus précieux à un souffle de vent ?

Le spectacle sur le site du Théâtre Royal du Parc 

 

JEANNE D’ARC AU BÛCHER d’HONEGGER au THÉÂTRE DE LA MONNAIE, vu par Jean-Pierre LEGRAND

Le TOP 5 de JEAN-PIERRE LEGRAND
Jean-Pierre LEGRAND

Hier, interpellante représentation à la Monnaie de Bruxelles, de la Jeanne d’Arc au bûcher d’Arthur Honegger sur un livret de Paul Claudel et dans la mise en scène controversée de Roméo Castellucci.

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Mettre en scène Jeanne d’Arc est un exercice périlleux tant la pucelle semble prisonnière de l’image déformée qui se dégage de l’entrelacs du récit religieux et de la fable nationaliste.

Jeanne d’Arc est une sainte d’un genre un peu paradoxal. Béatifiée sur le tard, au contraire d’autres saintes célèbres, elle ne peut stricto-sensu être considérée comme une martyre. Comme le rappelait Jean Guitton, Jeanne ne peut être tenue pour martyre au sens strict du mot, par la pensée catholique car c’est un tribunal d’Eglise régulier, dans un procès régulier qui lui infligea la condamnation et la mort, (…) un tribunal d’Inquisition canoniquement constitué ».

Tardive bienheureuse puis sainte, Jeanne d’Arc – pour son très grand malheur – s’est aussi muée, sous la plume du très exalté Michelet, en pasionaria du patriotisme français puis, plus tard, en icône de l’extrême droite nationaliste. Cette escroquerie intellectuelle dure encore.

C’est dire si la tâche de Castellucci était difficile. Fort courageusement ce talentueux metteur en scène a donc choisi un point de vue : celui de l’extrême distanciation. Ce faisant, il semble s’être souvenu du cri du philosophe Alain : « Surtout n’y mêlez pas Dieu !»

De fait, le spectacle s’ouvre sur un (trop) long prologue sans parole et sans musique. Devant nous une classe d’école pour jeunes filles, saisissante de réalisme. C’est une école de la République (il n’y a pas de crucifix au mur). Au son de la cloche, la classe se vide. Un concierge survient, il fait le ménage, d’abord normalement, puis, pris d’une soudaine frénésie il saccage la classe, projetant le mobilier dans le couloir et arrachant le linoléum. Le concierge bloque l’entrée de la classe. Frère Dominique se tient derrière la porte : directeur / négociateur (et non plus confident comme dans le texte de Claudel) va entamer avec Jeanne un long dialogue / négociation.
Les premiers accords montent de la fosse, étrange, sombre et mystérieuse. Progressivement le concierge se dépouille de ses vêtements et Jeanne apparaît dans sa nudité. Un dialogue en forme de négociation se poursuit avec frère Dominique.

Castellucci a choisi de privilégier la théâtralité de l’œuvre : nous ne verrons jamais les chanteurs ni les magnifiques chœurs de la Monnaie. Sur ce plan c’est une réussite car nous sommes embarqués dans un drame auquel son caractère composite aurait pu nuire : au contraire la force dramatique de ce texte parfois simpliste est sublimée ; c’est une tragédie musicale qui nous empoigne sans jamais nous lâcher. Si Sébastien Dutrieux est un excellent Frère Dominique, Audrey Bonnet est une inoubliable Jeanne d’Arc. Elle use de tous les registres avec un égal bonheur. Jeune fille naïve et un peu perdue, elle nous émeut ; submergée de colère, déterminée et brutale, elle nous rappelle par certains traits ce qu’elle fut aussi : une combattante (une guérilleros pour parler comme Guillemin) « risquant sa vie, gueulant dans la mêlée, se battant comme un homme, grimpant aux échelles sous les flèches et les pierres et la poix brulante… ».

Habillant tout ce drame d’une musique habitée, Honegger a mélangé tous les genres musicaux, avec selon moi, un bonheur encore transfiguré par la baguette de l’excellent Kazushi Ono et du remarquable orchestre de la Monnaie.

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Reste que tous les partis-pris du metteur en scène ne sont pas également justifiés. La nudité de Jeanne – qui a beaucoup fait gloser l’absurde Fédération Pro Europa Christiana – a du sens sans pour autant s’imposer comme une nécessité. Par ailleurs, la distanciation extrême qui conduit d’une certaine manière à couper Jeanne de ce Dieu qui est tout pour elle, aboutit à une évocation que certains jugeront – non sans raison – hors propos, « à côté du sujet ».

Partagé sur ce point au sortir du spectacle, je préfère y voir une double allégorie réussie : celle de l’extrême altérité et de l’absolue solitude qui l’accompagne et celle, magistrale, de l’imaginaire collectif et de ses sortilèges : lorsque les gendarmes pénètrent dans la salle de classe dévastée, toutes les traces du drame qui vient de se jouer ont disparu.

Depuis son entrée dans l’histoire, l’homme aime, tue et massacre au nom d’ordres imaginaires.

Le spectacle sur le site de la Monnaie

 

 

LE ROMAN D’ANTOINE DOINEL au THÉÂTRE VARIA de BRUXELLES / Une chronique de Jean-Pierre LEGRAND

CE QUI ARRIVE, mis en scène par Coline STRUYF au THÉÂTRE VARIA
Jean-Pierre LEGRAND

Très beau spectacle hier de la Compagnie De Facto au théâtre Varia.

Le roman d’Antoine Doinel imaginé et monté par Antoine Laubin et Thomas Depryck  est une adaptation pour la scène de la « saga » Antoine Doinel réalisée par François Truffaut entre 1959 et 1978. Il se joue au Varia du 24 septembre au 12 octobre.

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La pièce raconte les aventures d’Antoine Doinel, à cinq âges de la vie. Elle défie toutes les règles communes du théâtre : spectacle fleuve de près de quatre heures, il ne lasse jamais ; nous quittons à regret cet univers pour lequel nous avons fini par nous évader du nôtre. Véritable kaléidoscope narratif mêlant les époques, multipliant les flashbacks (périlleux au théâtre), il ne perd jamais le spectateur en cours de route.

Ce tour de force est rendu possible par une mise en scène époustouflante et le jeu remarquable des acteurs.

Lorsque nous pénétrons dans la grande salle du Varia, une surprise nous attend. Il n’y a pas de scène mais un entrelacs de passerelles à un mètre du sol. J’ai pensé à Venise sous les eaux. Les spectateurs prennent place dans les vides du dispositif : les sièges sont pivotants, ce qui permet de suivre les allées et venues des acteurs. Trop souvent des mises en scène complexes (plus encore à l’opéra qu’au théâtre) satisfont davantage l’ego du metteur en scène qu’ils ne servent le propos de la pièce. C’est tout l’inverse ici. Ces passerelles qui ne mènent nulle part tracent le chemin d’une course éperdue et figurent les bifurcations et échappées incessantes d’un Antoine Doinel perpétuellement en fuite : fugue, petits boulots, instabilité sentimentale chronique, velléités diverses se succèdent.

Après l’entracte, nous retrouvons la scène habituelle et ses gradins de face : Antoine Doinel s’est tout provisoirement posé : il a un métier, s’est marié et devient père. Tout cela ne va pas durer.

Le jeu des acteurs est en harmonie avec la totale réussite de la mise en scène. Adrien Drumel est un formidable Antoine Doinel. Il le joue à tous les âges y compris celui de l’enfance ; il y a là un peu de la magie de la remémoration où celui qui se souvient ressuscite celui qui fut dans les habits de celui qui est. Grâce son jeu sensible il rend toutes les facettes de son personnage comme les éclats d’un miroir réfléchissent leur part de lumière : drôle, touchant, exaspérant, poignant par ce désespoir qui passe fugacement dans son regard. Qualité rare au théâtre et que rend possible une  mise en scène de proximité : nous ne perdons rien des regards.

Aux côtés d’Adrien Drumel tous les comédiens – Valérie Bauchau, Caroline Berliner, Coraline Clément, Philippe Jeusette, Sarah Lefèvre, Jérôme Nayer, Renaud Van Camp, Adeline Vesse sont parfaits, avec une mention spéciale pour Philippe Jeusette et Valérie Bauchau (souvent très drôle) qui jouent les pères et mère de Doinel puis incarnent différents couples mariés, Doinel tombant amoureux plus encore des parents de l’élue du moment que de cette dernière.

Reste le propos de la pièce, finement interpellant comme celui des films de Truffaut.
Doinel est un marginal à la fois tranquille et agité ; incapable de se fondre dans le moule social, il ne se révolte jamais : il court, bifurque, dribble, fuit toujours. Il n’y a pas d’humanité sans société et pas de société sans entrave : qu’il s’agisse de l’école, du travail, du couple, de nos loisirs, le fait social est massif et incontournable. Certains se meuvent avec aisance entre les barbelés de l’existence sans même les apercevoir, d’autres s’y déchirent sans cesse. C’est le cas de Doinel. La révolte est vaine mais pas la vie puisqu’elle permet même d’écrire un roman : le Roman d’Antoine Doinel.

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Le spectacle sur le site du Varia

Le spectacle sur le site de la compagnie De Facto

 

TRISTAN UND ISOLDE de RICHARD WAGNER à LA MONNAIE / Un spectacle vu par Jean-Pierre Legrand

Le TOP 5 de JEAN-PIERRE LEGRAND
Jean-Pierre LEGRAND

Vu ce week-end un très beau Tristan à la Monnaie, à Bruxelles.

Véritable opéra du désir amoureux et de la personnification de l’amour, cette oeuvre ouvre un fabuleux terrain d’expérimentation et, en même temps, constitue un défi écrasant. Wagner a resserré l’action au maximum et réduit les personnages à quelques-uns. Peu d’action mais un élan venu des profondeurs de l’être, un désir qui supplicie l’âme. Comment représenter cela ?

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D’emblée le metteur en scène fait le ménage et opte pour le minimalisme. Pas d’esquif menant Isolde au Roi Mark, pas de glaive ; pas de fiole contenant le mystérieux philtre ; des tenues improbables qui n’avantagent guère les chanteurs et, tombant mollement des cintres, d’étranges structures d’un fin voilage blanc. Ce début me laisse perplexe.

Très rapidement néanmoins, je suis subjugué par la musique dirigée avec précision et autorité par l’excellent Alain Altinoglu brillamment secondé par un orchestre de la Monnaie en pleine forme. Le chant est de toute beauté : les voix sont superbes et loin des excès auxquels prête parfois cette partition, on perçoit ici d’infinies nuances qui creusent un peu plus encore le mystère de ce désir lancinant qui ne connaîtra son accomplissement que dans la mort.

Vient le deuxième acte, le plus réussi de mon point de vue.

Au milieu de la scène, un arbre tout blanc, dénudé et à la ramure torturée. La musique enfle, l’arbre s’anime : des danseurs apparaissent que leur mimétisme parfait avait caché à notre vue : ils se tordent, rampent vers Tristan puis, dans leur reptation tourmentée regagnent l’entrelacs des branchages joignant en une suite ondulante de corps l’amant éperdu de désir à Isolde qui se tient faîte de l’arbre. L’effet est magnifique : par la médiation des danseurs, à distance, les deux amants se touchent, s’enlacent corps et âmes. Je tiens là un de mes meilleurs souvenirs de mise en scène.

Survient le troisième acte : en arrière-plan, une immense toile percée de tubulures permet différents jeux de lumières. Toujours plus minimaliste, l’ensemble est moins inventif et poétique qu’auparavant mais cette sobriété sied à l’aridité de l’action : Tristan se meurt ; il attend la venue d’Isolde qui tarde. Il ne se passe plus rien, si ce n’est cette attente. De cet étirement du temps dont la musique parvient à miraculeusement rendre compte monte l’ultime tension : le flux de la vie se tarit ; Tristan se désespère. Un cœur s’épuise, le nôtre bat de plus en plus vite.

Isolde arrive enfin.
La dialectique du jour et de la nuit qui parcourt toute l’œuvre, se résorbe dans la mort des deux amants. Ce n’est pas la fin du désir mais son assomption.

Du 2 au 19 mai 2019 au Théâtre de La Monnaie à Bruxelles

LES PALMIERS SAUVAGES de FAULKNER mis en scène par SÉVERINE CHAVRIER – Une chronique de Jean-Pierre Legrand

Le TOP 5 de JEAN-PIERRE LEGRAND
Jean-Pierre LEGRAND

Au départ, Les Palmiers sauvages sont une nouvelle – décapante comme tous ses écrits – de William Faulkner. Adaptée au Théâtre National de Bruxelles par Séverine Chavrier, cela donne une pièce puissante, dérangeante qui secoue le spectateur et lui donne l’envie irrésistible de revenir autant de fois qu’il y a encore des représentations au programme ou au contraire de s’enfuir, saisi d’un mélange de peur et de désapprobation viscérale. Je suis dans la première catégorie mais il s’en est trouvé de la seconde durant le spectacle. 

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L’histoire est simple. Charlotte coule une vie bourgeoise avec mari et enfants mais a des prétentions artistiques. Harry est étudiant en médecine, interne dans un hôpital. Il n’a jamais connu de femme. Il paraît embarrassé de lui-même, un peu mutique, aspirant à être aimé : davantage candidat au coup de foudre qu’au jeu de la séduction.

Charlotte et Harry se rencontrent un peu par hasard et précisément c’est le coup de foudre. L’occasion aussi d’une belle trouvaille de mise en scène : ce coup de foudre claque chez l’un et l’autre tels des coups de feu : les corps se tordent comme mortellement atteints.

Les deux amants quittent tout : mari, famille, travail. Une passion torride, charnelle, exclusive et fusionnelle les entraîne. Ils se coupent de tout dans l’enfièvrement des corps et se réfugient dans un improbable bungalow. . Nouvelles trouvaille: le décor tient à la fois de l’appartement foutraque un rien glauque, de la cave ou du grenier. Des sommiers métalliques, des matelas à même le sol, un dénuement proche du sordide. Une immense étagère est bourrée de conserves qu’Harry compte et recompte et de casiers de bière. Ce sont leurs réserves. Premier signe tangible de la tragique temporalisation de la passion. Ils font l’amour partout et sont fréquemment nus sur cette scène peu habituée à de tels débordements.

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Amour total, amour charnel et asocial arc-bouté dans une opposition farouche au temps, il laisse pourtant entrevoir les premiers discords, l’imperceptible et subreptice écart que les deux amants colmatent aussitôt avec plus de furie encore. Le moteur du couple c’est elle dans sa folie et sa démesure. Lui en est le maillon faible : par qui un reste de culpabilité bourgeoise ouvre une voie d’eau, infime d’abord mais qui va s’élargissant. Sa situation est plus terrible que la mienne dit-il parlant de Charlotte : elle ne sait même pas ce qu’est l’espoir. D’ailleurs il se met à écrire : c’est mauvais signe (Aragon dit quelque part qu’on écrit toujours contre quelqu’un…).

Le drame se précise. Voici que Charlotte toujours en instance de distancer le temps est en retard. Un retard menstruel. Que faire ? Dehors le vent – omniprésent – reprend de plus belle. L’enfer n’est plus très loin…

On sort de cette pièce un peu cabossé mais heureux d’avoir assisté à un spectacle rare, joué par deux acteurs d’exception – bravo à Laurent Papot & Deborah Rouach – et servi par une mise en scène à la précision chorégraphique qui tire parti, sans jamais en abuser, des effets vidéographiques et sonores.
Les représentations sont malheureusement terminées. L’occasion de lire ou relire cette nouvelle au désespoir capiteux : « Si Vénus revenait sur terre, ce serait sous les traits d’un pouilleux offrant des cartes postales obscènes ».

Les Palmier Sauvages au Théâtre National de Belgique

Les Palmiers sauvages de William Faulkner chez Gallimard

 

CE QUI ARRIVE, mis en scène par Coline STRUYF au THÉÂTRE VARIA

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Jean-Pierre LEGRAND

« Où est passé le temps ? » : tel  était la question posée par un ouvrage collectif paru il y a quelques années déjà.
« Ce qui arrive », adaptation théâtrale par Coline Struyf du roman graphique de Richard McGuire et à laquelle j’ai assisté ce samedi au Théâtre Varia, semble être une des réponses possibles à cette question.

Nous sommes dans le salon d’une maison. L’idée très forte du roman graphique et reprise ici est de faire graviter autour de ce lieu fixe, toutes les époques passées (jusqu’à la préhistoire) et futures (jusqu’en 2314 ) sous forme d’allers retours sans logique apparente autre que celle de la vie elle-même avec la rémanence de ses joies et de ses peines, des naissances et des disparitions, de l’amour et du désamour.

Si on se sent un peu perdu au début, un calendrier numérique et une intelligente utilisation des images vidéo nous aident à nous y retrouver avec, souvent, beaucoup de poésie. Une des très bonnes idées de la metteur en scène Coline Struyf, est d’utiliser, pour les époque contemporaines, diverses ponctuations musicales emblématiques d’une époque (par exemple Mrs Robinson de Simon & Garfunkel).

Ce recours à la chanson dans une telle pièce est particulièrement judicieux : la musique est l’art du temps par excellence et la chanson lorsqu’elle atteint un certain degré de fusion avec son époque, devient par la magie de nos réminiscences, « un peu de temps à l’état pur ».

Les acteurs – membres du collectif Mariedl –  sont tous excellents avec une mention spéciale pour Nicolas Buysse, Thomas Dubos et Emilie Maquest.

Reste pour ma part une très légère réserve : par moment, Coline Struyf semble s’être un peu trop fait plaisir. Nous avons ainsi droit à l’intégralité du Famous blue raincoat de L. Cohen, chanson magnifique que j’adore mais qui, faisant plus de cinq minutes, finit par se muer en mini-tunnel dans cette belle mise en scène.

Cette pièce sera jouée par la même troupe au Théâtre de Liège du 12/03 au 15/03/2019

Ici de Richard McGuire sur le site de Gallimard

Toutes les infos sur la pièce jouée au Théâtre VARIA de BRUXELLES