CHOIX (libre)
Nous choisissons généralement de devenir ce que nous n’avons pas le pouvoir de ne pas être.
DÉSESPOIR
Le désespoir poli, pas trop mon truc. Son vrai nom me semble être résignation. J’ai plutôt le désespoir malpoli, rugueux et révolté. Je rue dans les brancards, hurle, griffe, mords et finis par sortir du trou. Pas question de me résigner : mon désespoir, je veux au moins le faire partager !
FEMMES
J’aime beaucoup trop les femmes pour être un grand séducteur.
GLOIRES (fausses)
Prendre des esbroufeurs sans conscience ni talent comme les Klein, les Warhol, les Koons pour des créateurs, c’est le fait d’une société si déboussolée et si incapable de se renouveler qu’elle ne sait plus à quel malsain se vouer.
IMAGINATION
Pas d’imagination sans curiosité, mais pas non plus sans culture. C’est ce que m’ont appris vingt ans d’improvisation théâtrale. L’imagination a besoin d’un terreau qui la nourrisse autant que de découvertes qui la stimulent. C’est sans doute pourquoi tant de mes contemporains en sont cruellement privés.
INSÉPARABLES
Même dans l’abstrait, nous figurons. Même dans la figuration, nous pratiquons l’abstraction. Voir, c’est déjà abstraire, penser c’est imaginer. Opposer figuration et abstraction, c’est ne rien comprendre à la peinture – ni à la vie.
LIBERTÉ
Notre seule vraie liberté : choisir d’être ce qu’on est. Vouloir être autre, c’est tricher, et c’est d’autant plus stupide que c’est impossible. Accepter d’être qui je suis, c’est du travail pour toute une vie.
PUÉRILS
Nous le sommes tous. L’important n’est pas de le savoir, mais d’en tenir compte.
REGARD
La plupart d’entre nous, quand nous regardons de la peinture – ou plutôt quand nous ne la regardons pas, tant notre œil est alors particulièrement vide et distrait –, j’ai l’impression que nous la salissons, et l’envie de nous foutre dehors. Ce regard, que j’appellerais bovin si ce n’était pas faire injure aux bovidés, il quête une sensation bien plus qu’il n’explore une création, c’est au pire sens du terme un regard absent. Un regard qui glisse comme à travers une vitre invisible, comme un signe de tête distant. On ne connaît pas, on ne veut pas connaître, mais on salue, à toutes fins utiles. Au mieux, on admire pour la forme, on dit qu’on aime… et l’on se détourne au bout de dix secondes !
Je préfère les regards qui dévorent ou qui rejettent, ils existent au moins. La peinture, on ne la regarde pas, on l’aime ou on la hait.
Idéalement, regarder de la peinture, c’est y plonger.
Faire la queue pour voir la Chapelle Sixtine et y passer en file indienne sans s’arrêter, c’est une injure à Michel-Ange et à l’art. Les prêtres qui ont organisé cela, impossible qu’ils aient la foi.
Extrait de « Remarques en passant 18 ».
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Pour en savoir plus sur Alain SAGAULT, écrivain, peintre et homme de théâtre, et lire d’autres de ses remarques, consulter son site :
http://www.ateliersdartistes.com/spip.php?rubrique21&var_mode=calcul
Merci à Patrice Maltaverne de Traction-brabant
de m’avoir envoyé ces Remarques en passant.
http://traction-brabant.blogspot.com/
A propos de Warhol – voir Gloires (fausses) – , on pourra lire le livre édifiant d’Hector Obalk, Andy Warhol n’est pas un grand artiste (Champs Flammarion) et voir sur Arte la série Grand Art qu’il anime.