MAMAN JEANNE de DANIEL CHARNEUX (Luce Wilquin)

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jeanne-couvert.jpgDes écueils de la vie…

J’ai beaucoup aimé « Maman Jeanne » de Daniel Charneux, ce pour diverses raisons.

Avant toute chose, il m’a rappelé nombre d’histoires situées plutôt au XIXème siècle, dont je me suis délectée au cours de ces dernières années de lecture. Des vies de femmes misérables, qui ne comptaient pour personne, humiliées, ignorées et maltraitées. J’ai retrouvé beaucoup de points communs avec cette lecture.

Ensuite, la façon, la construction de ce livre est inhabituelle. Le narrateur observe et écoute Jeanne, sur la fin de sa vie, plutôt apaisée par un environnement moins hostile qu’elle a pu connaître. Elle se livre enfin et déverse ce qui lui pesait sur le coeur. Le sentiment de culpabilité de cette pauvre femme aura ravagé sa vie. Le peu de chance aussi, de mauvaises rencontres et des situations dramatiques.

Enfin l’écriture ! Très sensible, un regard empli d’humanité, une jolie prose, j’aurais aimé ce livre plus long rien que pour écouter encore Jeanne s’épancher.

« Alors, pendant que j’étais chez les soeurs, j’ai cherché une famille pour le garder, mon petit. J’ai écrit à Fémie, une amie que j’avais au village voisin, oui, je lui ai demandé si elle connaissait quelqu’un qui voudrait bien reprendre mon petit pour vingt francs par mois. J’irais en service, je travaillerais pour payer sa pension. »

Il en est encore, aujourd’hui, des « Maman Jeanne », des filles un peu naïves qui doivent subir plutôt que choisir, ce thème est hélas universel, et le nier serait se voiler la face. L’auteur livre ici un beau témoignage, sans aucune dureté, sans jugement, avec beaucoup de délicatesse et d’empathie.

 

charneux.jpgLe livre sur le site des Editions Luce Wilquin

Le blog de Daniel Charneux

 

Daniel CHARNEUX sera, le dimanche 13 novembre 2016, entre 11 h et 18 h, l’invité d’honneur du Cinquième Salon du Livre de Charleroi qui se tiendra à la Bibliothèque M. Yourcenar de Marchienne-au-Pont.

 

ALCHIMIE DU LIVRE: CINQUIÈME SALON DU LIVRE DE CHARLEROI

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L’Alchimie du Livre.

Quand ?

Le dimanche 13 novembre 2016 entre 11h et 18h !

Où ?

Bibliothèque Marguerite Yourcenar

Château Bilquin de Cartier

Salles de l’Espace Le Bourgeon

Place Albert 1er, 38,

6030 Marchienne-au-Pont

(entrée gratuite, bar, petite restauration, bouquinerie, facilité de parking, métro juste en face, gare à 300m)

 

Ce sera la cinquième édition de ce Salon initié par Serge BUDAHAZI et Carine-Laure DESGUIN où, comme chaque année, une quarantaine d’auteurs et d’éditeurs seront présents.

Autour de l’invité d’honneur: Daniel CHARNEUX se réuniront:

Gaëtan FAUCER, Pierre DESAGRE, Philippe De RIEMACKER, Carine GEERTS,  RICHARD JEAN-JACQUES, Salvatore GUCCIARDO, Olivier MARCHAL,  Marcelle PÂQUES , Pierre-Paul NELIS, Elide MONTESI, Yannick BRIE, Sandra DULIER, Marie-Thérèse CARLIER, Laurence AMAURY, Marie KLIMIS, Rolande MICHEL, Vanessa DUBANIEWICZ, Philippe SOMBREVAL, Pierre-Armand CAJOT, Brenda BOTEGA, Arnaud STOUFFS, CYPRES DE TON HÊTRE, Sarah MARAZZATO, Ghuo-Zhing TONG, Christina PREVIOTTO, Claudine CLABOTS, Jean-Pol SAMAIN, Jean DESTREE, Dominique THEWISSEN, Genevière MAIRESSE, Carine-Laure DESGUIN, Philippe LIENARD, Ayi HILLAH, Jiri PRAGMAN, Solenn EMMYRIQUE, Éric ALLARD, les éditions ENCRE ROUGE, les Editions AMANT VERT… 

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Découvrez la page Facebook de la manifestation !

DES MAILS SECRETS ENTRE PAUL MAGNETTE ET ANDRÉ ANTOINE jettent le discrédit sur le Premier wallon

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L’existence d’une correspondance électronique secrète entre le ministre-président wallon et le président du Parlement wallon jettent le trouble sur les conditions de l’accord sur le Ceta survenu jeudi chez ceux qui n’ont jamais cru (après coup) à la sincérité  de la démarche du Premier wallon.

Ce qui le discrédite tout à fait à leurs yeux, c’est un mail qu’aurait échangé, via Franco Dragone, Paul Magnette avec Céline Dion à propos du dernier album, Encore un (grand) soir, de la chanteuse et d’un poème de Pasolini à mettre en musique par Jean-Jacques Goldman. Ce goût du secret n’est pas du tout du goût de tout le monde !

On a aussi appris que Paul Magnette aurait approuvé l’obtention du Nobel de Littérature à l’Américain Bob Dylan et qu’au cours d’une conversation tenue secrète avec Benoît Lutgen et Maxime Prévot, il aurait souri des opérations de chirurgie esthétique et politique de Vladimir Poutine, ce chantre de la paix dans l’ex-monde communiste et au-delà dont on sait que l’âge n’a pas de prise sur lui.

Face aux interrogations que posent ces nouvelles révélations, Paul Magnette a tweeté qu’il ferait toute la transparence sur sa correspondance (y compris ses cartes postales de vacances à Elio Di Rupo) et son autocritique en temps et en heure. Bien sûr, il plaisantait mais peut-on encore plaisanter sur ces délicates questions d’économie publique en ces moments  sombres où on s’apprête à passer à l’heure d’hiver?   

RENTRÉE LITTÉRAIRE 2016: CACTUS SORT SES PIQUANTS

arton117866-225x300.jpgpar DENIS BILLAMBOZ

La rentrée littéraire ne concerne pas que les romanciers, les auteurs de textes courts, aphorismes et autres formes de jongleries avec le langage et les mots ont aussi fait la leur. Et, en la matière, le grand spécialiste, c’est désormais le célère Cactus inébranlable qui a publié pas moins de sept recueils simultanément pour cette rentrée, non pas parce que c’est la rentrée littéraire pour les médias mais surtout parce que c’est son métier et aussi sa vocation et sa passion de faire connaître ces auteurs talentueux et trop méconnus. Je vous propose aujourd’hui une première livraison de trois recueils qui m’ont certes diverti mais qui m’ont surtout enchanté. Les maîtres du langage ne sont pas morts !

 

couverture-l-esprit-fera-peur.jpg?fx=r_550_550MICKOMIX

L’ESPRIT FERA PEUR!

Cactus inébranlable

Mick c’est évidemment Mickaël mais omix ce n’est certainement pas Serré, alors c’est peut-être komix ou alors comix comme les fameux dessins que Wikipédia définit comme : « Le terme (qui) sert à désigner la bande dessinée underground américaine. Il a été forgé en remplaçant par un « x » les deux dernières lettres du mot « comics » (« bande dessinée » en anglais) afin de souligner l’importance de la sexualité dans ce courant de la bande dessinée ». Alors, on pourrait supposer que Mick c’est Mickaël qui décoche les « Faux adages et vraies maximes » annoncés par le sous-titre de ce recueil et que komix c’est Serré celui qui tient le crayon qui dessine les jolies illustrations, un peu polissonnes, qui agrémentent les pages de cet opus.

Mickomix, d’après le titre cherche à effrayer le lecteur en lui décochant des adages totalement bidon :

« Con pétant. Con sentant »

Et des maximes qui ne sont pas toujours totalement fausses :

« C’est quand on s’éteint qu’on voit la lumière au bout du couloir ».

Mais tout cela n’est qu’humour et espièglerie, l’essentiel reste que Mickomix est un expert en blague en tout genre, qu’il manipule les mots, l’aphorisme et l’assonance dont il joue comme certains du pipeau. Il se définit lui-même, selon l’éditeur, comme « … artiste athée, mais créant ».a-mons-2017.jpg?fx=r_550_550

Mick flingue les mal pensants qui pourrissent la vie des honnêtes citoyens :

« C’est dans les bas-fonds

d’investissement que nagent les

requins de la finance ».

pendant que Komix, lui, se régale en diffusant des aphorismes coquins, sulfureux et même un peu paillards :

« Non passoire chéri, j’ai mal aux trous »

« Le cul d’une vieille pute est à la porté de toutes les bourses »

Voilà, un recueil qui fera passer un bon moment à tous ceux qui ne sont pas coincés et qui comprennent l’humour même quand il est un peu gaillard ou quand il s’en prend aux trop bien pensants qui ne pensent qu’à eux et bien peu aux plus démunis. L’auteur a présente lui-même le menu du jour proposé aux lecteurs :

« Aphorismes, vrai faussaire

à faux adages, vraies maximes

à faux-fuyants, vrais poltrons

apophtegmes, toi-même !

& autres petites pensées éparses »

C’est clair comme le menu d’un restaurant bardé d’étoiles mais c’est beaucoup plus drôle. Alors, on restera sur cette fameuse conclusion assénée par l’auteur :

« Les gros porcs sont tous des gros ongulés. »

Ca c’est bien vrai !

Le livre sur le site de l’éditeur

Le blog de Mickomix 

 

couverture-l-armes-24082016.jpg?fx=r_550_550Jacky LEGGE

(L’)ARMES À FEU ET À SANG

Cactus inébranlable

Si le sous-titre apposé par l’auteur : « Réflexions sans importance, sauf quelques-unes » me semble un acte de modestie très exagéré, je suis par contre beaucoup plus interpellé par le premier mot du titre qui, à mon sens, contient déjà à lui seul l’essentiel du recueil. En effet, le jeu de mot sur « (L’)Armes » dévoile les intentions de l’auteur en suggérant les larmes que l’usage des armes provoque bien trop souvent hélas. Dès le titre Jacky Legge nous laisse entrevoir le message de paix qu’il voudrait adresser à tous ceux qui font usage des armes pour toute sorte de raisons plus mauvaise les unes que les autres.

« Il y a trop d’armes lourdes entre des mains légères, soupira le Parrain »

« En temps de guerre, la Mort coupe les épis de blé vert »

L’éditeur nous raconte que l’auteur est un « explorateur littéraire passionné par les cimetières », il a donc rencontré au cours des ses promenades de nombreuses tombes de jeunes militaires morts pour défendre des causes qu’ils ne comprenaient pas toujours.

« La guerre est le cancer de l’humanité ; il est sans rémission. »

« Les permissions n’ont pas de sens pour les orphelins de guerre »

Sous l’humour et la causticité de ses « réflexions sans importance » se dissimule mal sa compassion pour les innocentes victimes qui n’ont jamais rien demandé.b57515ce-7960-11e3-a7e8-0bcd47b1af90_original.jpg?maxwidth=756&scale=both

« Toute sa vie, la veuve pleura le temps trop bref qui sépara la déclaration d’amour de la déclaration de guerre » (cette réflexion n’est pas qu’une formule littéraire, j’ai connu cette situation dans ma famille).

« La guerre est un cirque où les fauves ont dévoré les clowns. »

« La guerre, c’est toujours le massacre du printemps. »

Ce recueil n’est pas qu’un plaidoyer contre la guerre, c’est aussi un bel exercice littéraire dans lequel Jacky Legge dévoile un réel talent et un esprit très affuté. Certaines de ses réflexions sont, en plus d’être très pertinentes, très drôles.

« L’odeur de compote provoquait des nausées à Guillaume Tell et à son fils »

« L’héroïne est une arme blanche redoutable »

« Seuls les Inuits restèrent indifférents à la Guerre froide »

Je ne saurais clore ce propos sans évoquer les illustrations de Priscilla Beccarri qui agrémentent le recueil, des dessins qui collent bien au texte, des victimes innocentes des armes assassines.

J’ai gardé cette réflexion pour la fin, elle m’a bien fait rire, je la trouve très drôle.

« Un franc-tireur, c’est pas cher.

Un sous-marin, non plus. »

La violence est à la portée de tous !

Le livre sur le site de l’éditeur

 

couverture-les-hamsters....jpg?fx=r_550_550Francesco PITTAU

LES HAMSTERS DE L’AGACEMENT

Cactus inébranlable

Francesco Pittau, c’est un peu « Tête-Dure » le héros éponyme de ce roman que j’ai tellement aimé, un gamin taciturne, rêveur, imaginatif et débrouillard qui est devenu un adulte poète amer et acide qui supporte mal la stupidité, la bêtise et même la connerie de ses congénères. Il a peut-être la tête toujours aussi dure mais ce que ce recueil révèle c’est surtout qu’il a la dent dure envers ses collègues manieurs de plume qu’il maltraite volontiers, dénonçant tous ces « écriveurs » sans talent qui déversent leur mot sur le papier en espérant envahir les rayonnages des librairies.

« Il y a beaucoup trop de poètes géniaux et pas assez de boulangers capables de faire une bonne brioche aux raisins. »

Il n’a aucune pitié pour ces sans talent ambitieux, il les classe avec ceux qu’il affectionne particulièrement : les cons, les cons qui occupent une place de choix dans son recueil.FRANCESCO-PITTAU.jpg

« Il y en a qui ont des têtes de cons, puis il y en a qui ont des têtes d’écrivains… et c’est souvent les mêmes. »

« Les cons disent qu’on est toujours le con de quelqu’un, en espérant ainsi échapper au diagnostic. Bien sûr qu’un moment d’inattention peut toucher n’importe qui, mais y en a pour qui c’est l’abonnement 24 heures sur 24. »

Il a une idée bien précise pour traiter ces dévoreurs de papier :

« Un coup de pied au cul, une baffe dans la tronche, une torsion des oreilles, un arrachement du nez, un genou dans les couilles… et tout ça pour son bien ! »

Si Pittau décoche des flèches empoisonnées à tous les cons qu’ils écrivent ou non, lui, il ne risque pas la vindicte de ses collègues de plume, lui, il écrit des aphorismes comme Verlaine écrivait des vers, c’est un poète, un vrai :

« La nuit collait au visage comme une seconde peau et les étoiles s‘incrustaient au fond des orbites, vives brûlantes, pareilles à des rêves inachevés. »

« Sur son pain de rêve, il déposa une cuillère de confiture de nuit avant de prendre une gorgée de matin de soleil inattendu. »

Il s’inscrit comme beaucoup d’auteurs réunis chez Cactus Inébranlable dans la droite ligne des surréalistes belges. Il manie avec adresse l’absurdité, le burlesque, l’ironie pour énoncer des vérités évidentes, la fatalité fatale, l’ironie désarmante, l’imbécilité imbécile, … :

« Il pissait comme vache qui pleut »

« Quand tu montes une descente et que tu descends une montée, il est bien possible que tu commences à comprendre le sens de l’existence. »

« Il faut bien admettre que la civilisation du Canada Dry et de la Tourtel est en train de remporter la manche. »

« Depuis qu’une loi reconnaît les animaux comme des êtres doués de sensibilité, on les zigouillera dorénavant à coups de boules de coco et on les égorgera à la fraise tagada. »

« Si l’ironie pouvait se contracter comme la grippe, le monde irait mieux. »

Un recueil copieux, désopilant, une leçon de bon sens mais aussi quelques moments de pure poésie qui confirment que « Tête-Dure » n’est pas une réussite isolée, l’auteur a un talent fou. Et pour vous en convaincre, je vous offre quelques vers pour la route.

« Le petit matin

Se pendait au rideau

Avec ses doigts dorés

Avant de pousser ses

Cris de soleil et d’azur

Comme une bouche de bébé. »

Tout savoir sur le livre sur le site de l’éditeur

Le site du Cactus Inébranlable

STROBOSCOPE suivi de STRIES d’ARNAUD DELCORTE (L’Harmattan)

13340216_10154107648608213_8831710446046276692_o.jpgÀ l’envers du monde à l’endroit du rêve

Des trois acceptions du terme données en préambule, on retient que le stroboscope donne l’illusion de mouvement ou d’immobilité. Arnaud Delcorte, lui-même saisi dans le mouvement de l’écriture, rapporte quantité de visions, de flashes pris dans les filets de son regard de passant ou son imagination de rêveur inquiet.

Il balaie de ses yeux-scanners le défilement du monde.

Des éclats bleus sur nos hanches des harpons de ciel qui nous crèvent /

Toute cette machinerie de sons et d’évènements dans l’enfance aseptique des néons /

 

Il décline des fulgurances  qui le mettent en péril, le blessent, le font basculer, continuer à avancer envers et contre tout…

Il déconnecte (sa) tablette et allume résolument la vision.

Des chimères filles-mères  immolées à ciel ouvert larguées à tombeau ouvert /

Pour un marchandage à bon marché dans les bas-côtés de l’existence /

 

Il met en double ligne, dans une écriture électrique et syncopée, un monde hyperconnecté et dans le même temps déconnecté du réel, le strass internet les visions noires paradisiaques.  À la façon de Rimbaud, auquel il fait plus d’une fois penser, il note l’inexprimable, il fixe des vertiges.  Il décrit un monde froid et cruel en transformation qui nous éloigne, nous sépare du sensuel, de l’humain, de la douceur des peaux, un monde qui se soigne avec des images virtuelles, de la communication à distance…march%25C3%25A9%2B%2Bde%2Bla%2Bpo%25C3%25A9sie%2B2016%2B011.JPG

Delcorte décrypte un espace virtuel dont on ne meurt pas (car) on se berce d’insuffisance digitale.

À l’envers du monde à l’endroit du rêvé le jeu des étonnements /

Dissimule un oiseau de lignes et de larmes un oiseau-mystère /

Il frotte les deux, le rêve et le réel, l’un contre l’autre, comme il ferait de deux silex pour en tirer des étincelles visuelles, des jeux de maux, des illuminations. Et le catalogue déraisonné des visions traverse des îlots de calme, des plages de réalité pure…

Le geste incontrôlé des choses du monde lacère le champ de bataille de la toile/

On voudrait peindre la beauté sans son cordon ombilical /

 

Stries, avec d’abord  ses poèmes verticaux, plus classiques au niveau de la forme, prolonge la problématique du stroboscope consistant à questionner le mouvement dans l’immobile et l’immobile dans le mouvement.

Le propos du recueil résonne très fort d’ailleurs avec cette citation de René Char (Le soleil des oiseaux) : Je crois que la poésie, avant d’acquérir pour toujours, et grâce à un seul, sa dimension et ses pouvoirs, existe préliminairement en traits, en spectre et en vapeur dans le dialogue des êtres qui vivent en intelligence patente avec les ébauches autant qu’avec les grands ouvrages vraiment accomplis de la Création.

Viennent pour terminer, en diarrhées verbales non exemptes de sens, des moments de force et des turbulences de pensée, le tout s’achevant par une sorte de nirvana, d’éveil (j’acquiers la vision,  je vois les signes de corolles de chair entrouvertes…), où le poète est en relation avec le grand tout et lui-même,  ce qui apporte une note d’apaisement à cet ensemble volontiers torturé,  toujours en action, sur le qui-vive, à l’image du grand vivant qu’est Arnaud Delcorte.

Le livre est bellement préfacé par Catherine Boudet et est dédié à la mémoire d’Alexander Mc Queen.

Éric Allard

Le livre sur le site des Editions L’Harmattan

JOUEUR DE LIVRE

livre-objet-livres-faire-peur-L-sOs3iB.pngJe lisais un bouquin quand, par inadvertance, je découvris la musique du livre. Elle s’annonça par un son, plus qu’un chuintement et moins qu’une plainte, duquel très vite je tirai d’autres bruits, toute une mélodie, concrète certes mais qui disait le livre au plus près de son être.

Il s’agissait de La colonie pénitentiaire et autres récits de Kafka. Comme il eût pu s’agir des Voix de l’asphalte de Philip K. Dick, du Journal d’un fou de Gogol ou du Jeu des perles de verre d’Herman Hesse.

En tordant le livre d’une certaine manière, puis en en jouant un peu comme d’un accordéon, je tirai toutes les notes de l’ouvrage. Je crus d’abord à un écho du mécanisme de la machine infernale du récit, grincement de ses rouages ou supplique du condamné, mais non…
La méthode fonctionna sur d’autres livres et d’autres auteurs si bien que je pus me constituer bien vite tout un répertoire.
Connaissant le goût du lecteur grégaire, aussi amateur de convivialité que de lecture, à domicile ou à l’extérieur, pour autant qu’on parle d’art un verre à la main, qu’on cliquète et qu’on caquète, qu’on s’anime en lisant, qu’on affiche ostensiblement son mépris des péquenots comme des rentiers, des nobles d’esprit comme des écervelés, je n’eus pas de mal à me trouver une clientèle pour mes jeux de livre, que j’adaptai au goût de mes commanditaires.

Il m’arriva plus d’une fois de jouer des auteurs que je n’appréciais guère voire pas du tout mais comme j’étais devenu un excellent interprète, rien ne paraissait de mon indifférence à l’auteur en question, qui se trouvait parfois  (les auteurs sont partout !) dans l’assistance et semblait juger mon jeu alors qu’il était lui-même incapable de tirer le moindre murmure de son propre livre (les auteurs sont de pâles interprètes de leurs ouvrages).

Mais durant une période où je n’étais pas dans mon assiette, je plantai un concert, puis deux, bientôt trois… C’en fut trop, on fit moins appel à moi et puis plus du tout. D’autres, plus habiles, moins scrupuleux, interprétaient les livres avec plus d’entrain ou de pathos; ils joignaient le geste à la musique et se constituaient des lors des clientèles au détriment de la mienne.

Un d’entre eux, ancien comédien de série télé, qui massacrait régulièrement des livres dans les émissions littéraires, ne cita jamais le nom du découvreur de ce nouveau genre d’animation culturelle et on crut bientôt qu’il en était le créateur.
Je me contente aujourd’hui de jouer quelques livres choisis, des plaquettes à la stridulation aiguë, des volumes épais au martèlement de grosse caisse, dans l’intimité de mon salon, de mon bureau ou de ma chambre quand ma femme et mes enfants ne sont pas là ou regardent un écran dans le salon car ils ne supportent plus de m’entendre jouer.

Aujourd’hui, j’ai repris l’activité de bibliothécaire que j’avais abandonnée au moment fort de mon succès d’interprète. Mais les lecteurs viennent désormais emprunter les livres qu’ils ont entendu jouer la veille dans leur émission littéraire préférée en espérant en tirer quelques accents déchirants qui leur assureront à terme un début de notoriété.

Album-souvenir de la lecture de textes d’Eric Allard par le Box Théâtreà la BMY de Marchienne-au-Pont

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La lecture vivante a eu lieu à la Bibliothèque M.Yourcenar de Marchienne-au-Pont le samedi 15 octobre 2016.

Vifs remerciements aux lecteurs: Anne Lépine, Véronique Dubois, Lior Desamory et Fabien Sansterre ainsi qu’au directeur du Box Théâtre et du cycle de lectures Aux Murmures des Muses: Eric Delhaye.

Sans oublier Serge Budahazi assisté de Carine-Laure Desguin pour l’organisation de la soirée dans le cadre de la Fureur de Lire. Et les amis présents.

Merci tout particulier à Thierry Ries

Merci à Salvatore Akli, Pierre Desagre, Carine-Laure Desguin, Véronique Dubois et Eric Delhaye pour leurs photos.

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D’autres photos sur la page Facebook consacrée à la manifestation

RENTRÉE LITTÉRAIRE 2016: Arrivages d’octobre

arton117866-225x300.jpgpar DENIS BILLAMBOZ

 

 

 

 

 

 

9782809712063FS.gifSOUDAIN, J’AI ENTENDU LA VOIX DE L’EAU 

Hiromi KAWAKAMI

Editions Picquier

« Soudain, j’ai entendu la voix de l’eau », de l’eau que même la Muraille de Chine n’a jamais pu arrêter, de l’eau qui compose nos corps, de l’eau que Ryô répand dans le corps de sa sœur Miyakô. Miyakô et Ryô, un frère et une sœur vivent ensemble depuis que leur mère est morte et qu’ils n’ont pas voulu rester seuls chacun de leur côté. Miyakô, l’héroïne et la narratrice de cette histoire, entraîne le lecteur dans une introspection au sein d’un huis clos familial composé d’elle, la fille aîné de la famille qui travaille à la maison, de Ryô le frère cadet qui vit avec elle, de la mère qui décède trop tôt, du père qui s’éloigne un peu après le décès de la mère, de Takejei celui qui a toujours aimé la mère sans jamais pouvoir l’épouser et d’une seule et unique amie.

Miyakô raconte l’histoire de cette famille dans un texte, doux, délicat et tendre sans aucune violence, un texte qui coule paisiblement comme l’eau qui baigne les corps. Totalement plongée dans le passé de cette famille, sans jamais essayer d’entrevoir l’avenir, elle essaie de comprendre comment elle est tombée amoureuse de son frère et comment ils en sont venus à partager leur vie. La mère qui préférait le frère, rayonnait et attirait l’amour et la sympathie tout en fascinant sa fille qui l’admirait. « Maman était morte mais elle continuait à vivre en moi. Si bien que même si j’étais seule, je ne pouvais pas être seule ». La mère disparue, la fille a reporté cet attachement viscéral sur le frère qu’elle a toujours aimé tendrement et plus encore après qu’ils ont appris que leur père n’était pas leur père biologique.

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Hiromi Hawakami 

Une réflexion sur la raison d’être, l’amour, la famille, la vieillesse et la mort, une réflexion totalement détachée du contexte historique et social, sauf de la guerre que la narratrice n’a pas vécue mais dont elle connaît bien les torts qu’elle a causés à la famille et de l’attentat au gaz sarin en 1995 qui aurait pu être fatal au frère. Une réflexion qui l’amène à penser que le hasard joue un grand rôle dans ce que nous sommes et ce que nous vivons. « Nous ne sommes pas constitués de la signification que revêtent les événements, les choses qui se sont passées. Nous existons simplement au gré de ce qui nous arrive, nous sommes ce que nous sommes par hasard, pas la peine d’aller chercher plus loin ». Et que la vie n’est qu’une évidence simple que les hommes se complaisent à complexifier. « Tu ne crois pas que le monde serait plus supportable si les êtres humains étaient capables de dominer leurs sentiments ? »

La narratrice, et peut-être même l’auteure, essaient de nous faire comprendre que la vie serait une chose douce est facile, si nous acceptions de la prendre comme elle nous est offerte par le hasard et façonnée par notre passé. L’avenir, il suffit de l’affronter et de l’accepter. « Le mot de vieillesse est un mot avec lequel nous n’arrivons pas à nous familiariser. C’est comme s’il ne nous restait plus beaucoup de temps, une impression de ce genre. C’est peut-être aussi que nous ne voulons pas y penser, une sorte de préjugé, une illusion. »

Et la famille n’est pas un débat, c’est comme ça, car les sentiments ne se gouvernent pas, pas plus que le cours de l’eau ne peut-être entravé. « Dans la mesure où nous sommes ensemble depuis l’enfance, nous formons une famille, non ? » A chacun sa vie, à chacun ses amours !

Le livre sur le site des Editions Picquier

 

9782842638672.jpgLA PETITE GAMBERGE

Robert GIRAUD

Le Dilettante

Encore un ouvrage tiré du cimetière des livres oubliés par Le Dilettante, encore une balade dans les rues de la capitale, une croisière dans les rades de la Rive Gauche à la Bastille, de la Moufte à la Rambute, un livre comme je les affectionne, une verve qui rappelle Blondin, Audiard, Fallet et quelques autres encore, un roman de Robert Giraud publié en 1961. L’histoire d’une bande de petits truands aux maigres ambitions, trop émotifs pour supporter l’alcool que ses membres ingurgitent, le venin qui glisse dans la mécanique de leur amitié, le grain de sable qui va remettre en cause leur belle assurance et leur avenir insouciant.

Comme l’écrit le préfacier, Olivier Bailly soi-même, biographe de l’auteur, « La Petite Gamberge est un éloge de l’errance. Bob (pseudonyme de Robert Giraud) peint ses personnages avec tendresse. Il les regarde, évoluer, échouer lamentablement dans leur entreprise. Mais, il ne les juge jamais ». « Pour une équipe, c’était une belle équipe. Oui, de première, cinq bons gorilles, tous bien potes, qui s’occupaient ensemble et ne se quittaient jamais. Dans le milieu ils n’étaient que de vulgaires voleurs de lapins, mais parmi leur entourage à eux, ils étaient quelqu’un ». Un roman qui commence comme ça, je ne peux pas le lâcher facilement, j’ai envie de savoir qui sont ces petits malfrats et comment ils vont se prendre les pieds dans le tapis des combines mal ficelées.

A la Vieille Treille, rue Mouffetard, autour de la table qui leur était réservée dès la fin de la matinée, Il y avait là Bouboule, le boss celui qui dégotait et combinait les bons coups, ceux qui devaient les rendre riches à jamais ; le Manchot qui n’avait pas perdu son bras à la guerre comme il le racontait mais qui savait causer aux serrures les plus récalcitrantes ; Roger-perd-son-froc, toujours fagoté comme l’as de pic avec le bénard en berne ; la Douleur avec son air miséreux et pleurnichard mais aussi avec sa camionnette si précieuse pour le transport des marchandises ; et Pierrot la Tenaille, le petit jeunot, celui par qui la poisse a dégouliné sur la bande.

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Robert Giraud

Bouboule a monté le plus beau coup de la bande, tout a fonctionné comme prévu, La Douleur a planqué la marchandise nul ne sait où, la petite bande festoie et attend le moment opportun pou liquider les trophées. Mais, les poulets alpaguent Roger, personne ne croit au hasard, les soupçons naissent, épaississent, se focalisent, accouchent d’une certitude, le drame se noue, la tragédie est jouée.

Giraud a écrit l’histoire de l’une de ces petites bandes de petits truands qui hantaient les bistrots de certains quartiers parisiens, des pauvres gars issus de la guerre sans y avoir brillé, les poches vides, à la marge, pas encore à la cloche mais pas très éloignés tout de même. Cette classe sociale haute en couleur, forte en gueule, qui a fait le bonheur de quelques écrivains et de certains metteurs en scène.

Comme Modiano, Le Dilettante prend plaisir à balader ses lecteurs dans les vieux quartiers de Paris, dans ses bouges et ses rades, dans les pas des gens simples et souvent démunis, dans des textes de Mérindol, Calet et autres… Bouboule aurait pu croiser Monsieur Jadis entre le Bar Bac et la Vieille Treille et Robert Giraud a certainement partagé un gorgeon, et même plusieurs, avec Antoine Blondin et sa bande d’assoiffés.

Le livre sur le site du Dilettante