MOUSTAKI par Philippe LEUCKX

images?q=tbn:ANd9GcSMWM5csWptTmHC5cj-yJsyFcH5_LMQ1-wwXsTLl7MFutv6hWPzSi la fluidité, la transparence, la musicalité, les mots partageables de la tribu, l’élégance sont des vertus, alors Moustaki, qui les fêtait avec convivialité et chaleur, est un grand. Je sais, on est à une époque qui chérit les abscons et je lis régulièrement des « poèmes » qui me donnent envie de fuir tant ils sont cérébraux, sans âme, sans coeur, alors je me retourne et je trouve M O U S T A K I , intemporel, avec les mots, qui sont autant de fleurs, autant de pensées nobles.

A réécouter des titres comme « En Méditerranée », « Alexandrie », « Grand-père », « Il y avait un jardin », « Joseph », « Le métèque », « Les amis » et tant d’autres, c’est toute la beauté qui sourd de ces musiques d’une simplicité royale, cette voix discrète, qui va bien plus profond que les tonitruantes, me semble-t-il.

La beauté de la musique, de ses « racines et de ses errances », pour reprendre le beau sous-titre d’une des plus belles compilations de l’artiste (BALLADES EN BALADE, premier volume), la qualité du regard sur le monde, ses dérives, ses chants, ses femmes, ses plaies, l’engagement à l’heure où les terres méditerranéennes basculaient dans la dictature, tout Moustaki est là, dans cette attention au monde. De son enfance magnifiée par l’une des plus belles compositions (Alexandrie) à ce portrait de l’adulte, de la Grèce, de l’Egypte à l’Ile Saint-Louis, où il a longtemps vécu, tous ses territoires, il nous les a donnés à lire, passant du Brésil aux îles grecques, traversant la chanson et ses monstres (Piaf, Barbara, Reggiani…) sacrés, fêtés.

Exact contemporain d’Anne Sylvestre (née comme lui en 1934), fidèle à une composition soignée de la chanson poétique ( à la Ferrat, par exemple), en marge des grands ténors qu’il connaissait et admirait (Ferré, Brassens), il laisse trace, ce mélange inaltérable de poésie des mots et des sons, de sens du paradis perdu retrouvé de la fête et de la beauté.

Je l’en remercie.

P. L.