Trois recueils poétiques décalés. L’humour à l’honneur.
Trois univers au rendez-vous : cinéma, poésie japonaise et petite linguistique poétique.
1. Jean Marc Flahaut et Frédérick Houdaer, Cinéma inferno, Le pédalo ivre, juin 2018, 86p., 11€.
Dès le titre, le duo recourt à une référence d’emblée balayée par l’humour dévastateur, ce film de référence « Cinema paradiso » de Tornatore, pour nous plonger dans un univers de détournement absolu. On rit jaune noir dans « une ville livrée au chaos », celle du grand écran et des souvenirs infernaux qui le traversent.
Se moquer d’une liste de cinéma. Ou d’une blonde qui n’est pas vraiment blonde comme quand elle est brune, pas plus.
Le cinéma français; les westerns tournés dans la Sierra Nevada espagnole; le snobisme; les films aimés : tout passe à la moulinette des deux compères.
CREDO
« quand je serai grand
je ferai Tristan Corbière gérant de vidéoclub « (p.34)
L’enfer, pavé de bonnes ou de moins bonnes intentions, est un lieu où « je me perds dans un cinéma labyrinthique/ une sorte de multiplexe aux couloirs interminables » à la « Shining ».
Défilent des brutes, des blondes, des truands, de belles gueules, Bruce Lee, Harrison Ford, Jodie Foster, de quoi cibler large.
Le cinéma n’en finit pas de faire parler de lui. Les deux cinéphiles sauvages et acides l’ont bien compris.
Le recueil sur le site du PÉDALO IVRE
BRANLOIRE PÉRENNE, le blog de Frédérick HOUDAER
FROM YOUR FRIENDLY NEIGHBORHOOD, Le blog de Jean-Marc FLAHAUT
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2. Roger Lahu & Hozan Kebo, Théorie et pratique du haïku raté, Cactus Inébranlable éditions, 2018, 78p., 10€.
Ce genre bien à la mode, haïku, haïkaï, donne des ailes à deux contempteurs magistraux de ce style d’écriture qui voudrait ramasser, si possible, les atouts culturels loin de chez nous.
Chaque haïku proposé se voit criblé d’ironie () :
52
« les vrais rockers meurent à 27 ans
les vrais poètes sont maudits
les vrais haïkus m’emmerdent »
(mais j’aime bien les koans zen
brèves de comptoir
de vieux bhikkhus bourrés au saké)
(rien que ce mot « vieux bhikkhus »/ me fait marrer) (p.40)
95
« dans une foire « aux plantes rares »
j’ai goûté un pesto à l’ail des ours
meilleur que le mien ça m’a vexé » (p.63)
48
(quelle est la fragrance
d’un haïku raté :
florale boisée orientale hespéridée fougère chyprée cuir?)
(ici et maintenant ça sent l’oignon et le lardon)
Le recueil sur le site du CACTUS INÉBRANLABLE
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3. Eric Dejaeger, Les coureurs avaient de ces bouilles !, Cactus Inébranlable éditions, 2017, coll. Les p’tits cactus # 43, 82p., 9€.
Une linguistique, vraiment, sommeille en ces vers, aphorismes, définitions, titres détournés, jeux de préfixes, d’un humour énorme, se nourrit, se développe, sert de style de frappe pour un auteur qui se renouvelle dans le burlesque entre poésie, popoésie (coll. qu’il dirige), métaphysique des tututes, lexique bouffon, proverbes « sahélien » et « coprophile », calembredaines, calembours-ge, aphoristhmes:
« j’aurais pu être un drôle de monarque : j’eus bu, roi » (p.21)
LE PREFIXE MONO
« Mononcle : frère célibataire du papa ou de la maman »
« Mononne : religieuse ermite »
« Monotaire : officier public personnel » (p.33)
DICTON de fumeur
Glaires du matin, petit dèj’ malin.
(100% bio, et directement du producteur au consommateur.) (p.54)
Les bouilleurs avaient de ces c… !
Avec ce Dejaeger, tout est permis, et n’oubliez pas : son conseil : Contrepétez deux fois.
Merci, Philippe.
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