LA FABRIQUE DES MÉTIERS – 147. PORTE-MIME

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Le porte-parole a fait son temps : place au porte-mime !

Si le porte-parole reste parfois nécessaire, le porte-mime se révèle plus utile dans des situations où l’excès de paroles, le verbiage, la faconde sont contreproductifs.

Quand le silence est requis pour faire passer un message, une émotion, une explication, le porte-mime s’impose.

Fort de son art de l’attitude, dixit le sophiste Marceau, du geste dansé, ajouterons-nous, il peut tout figurer et faire accroire à l’interlocuteur. Nul besoin de mots qui viendraient brouiller la communication, la faire dériver vers des impasses énonciatives !
Dans les menues activités de la vie quotidienne comme dans les moments primordiaux, le porte-mime sera un atout, un plus, la nuance qu’on vous enviera dans les milieux pointus.

Vous êtes au café ou au Carré en tant que client ou bien serveur ; vous êtes au restaurant ou au lit avec votre amoureux ; vous êtes au bureau avec votre patron ou votre subordonné ; vous êtes dans une contrée lointaine sans votre application de traduction ; vous souhaitez échanger avec votre chat, votre chien, le tigre du Bengale ou l’araignée du matin ; vous êtes sur Mars face à un Martien pubescent, sur Vénus face à une Vénusienne sans rasoir ou plus prosaïquement sur la Lune à tailler une bavette avec un astronaute égaré ; vous êtes devant votre miroir face à vous-même ; vous êtes face à un gardien de la paix qui ne veut rien entendre ; face à une mégère qui ne vous laisse pas en placer une ; face à un vaniteux qui parle tout le temps ; face à un nègre qui réclame ses droit d’auteur ; vous êtes dans une discothèque, une salle des machines, sur un chantier de construction mais aussi en pleine nature, face à un hêtre qui vous prend de haut, face un saule pleureur qui baisse les branches, face à un papilionacé qui en a soupé des papillons, face à un tournesol qui ne veut plus voir tourner une abeille, face à une bombe qui avec ses obus vous imposent un silence de tombe…

Dans ces moments-là, le porte-mime sort son mime bien taillé qui, par une pantomime adaptée, transmet mieux qu’un long discours ce que vous avez à exprimer comme à réprimer. Tel un haïku dans une conversation poétique, tel un mot d’ordre dans une grève du langage, tel un vers solitaire dans une grappe d’alexandrins.

Pour exercer sa fonction au mieux, le porte mime se rechargera avec des traducteurs en langue de signes triés sur le muet, en mimes reconnus à leur pas par l’Association des Non-voyants à l’Ecoute, mais aussi en gesticulateurs précoces ou psychorigides et en différentes espèces d’air : les air guitaristes (qui tirent sur les hordes de fans), les air parachutistes (qui jouent sur la redondance et se plantent), les air nage libre (qui plongent), les air artistes (qui se la pètent et explosent en vol), les air enseignants (qui associent apprentissage et notation), les air politiciens (qui font mine d’aider le peuple), les air soignants (qui sont aux petits soins avec les médecins), les air mites (qui s’attaquent à vos vêtements esseulés), les air malins (pour dissimuler leur air bête) et autre Airbnb & air ma phlébite.   

Bref, et pour ne pas s’étaler en vingt mots (au moins), avec le porte-mime de la tacite Fabrique des Métiers, objet privilégié de la silence-fiction, vous serez capable de vous faire comprendre de n’importe quel cuistre et de répondre à n’importe quel quiz.

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